La "stagnation séculaire" décrit un état de la macro économie caractérisé par une croissance molle - faible ou nulle, en dessous du potentiel de croissance prévisible à long terme que permettrait le plein emploi de la main d'oeuvre avec le capital disponible et l'efficience du couple main d'oeuvre-capital, selon le modèle de Solow 1.
Le terme a été utilisé pour la première fois par l'économiste américain Alvin Hansen2 au moment de la grande crise des années 1930 quand l'économie américaine peinait à sortir de la crise.
Les graphiques suivants montrent le phénomène aux États-Unis, au Japon et en Europe:
Les prévisions sont les taux de croissances potentielles du PIB; elles varient dans le sens d'une diminution en raison de la prise en compte des facteurs qui affectent le PIB, notamment le ralentissement de la croissance démographique et le vieillissement de la population, comme au Japon et en Europe.
La "stagnation séculaire" est en fait le signe que l'investissement moteur de la croissance de l'économie diminue et qu'aucun des leviers politiques et monétaires ne permet de l'augmenter à nouveau. Ce que les explications des économistes ont en commun c'est que l'épargne, au lieu de circuler dans l'économie, se coince et s'accumule quelque part, en dépit des signaux de prix et de taux d'intérêt favorables, qui inciteraient à de faire nouveaux investissements. Toute réponse politique à la stagnation séculaire doit donc provenir de nouvelles incitations des investisseurs à investir, moyens qui ne sont pas forcément des signaux de prix - la décision du gouvernement Valls de permettre un amortissement accéléré va dans ce sens.
Il faut savoir que la croissance élevée durant trois décennies que les pays industrialisés ont connu après la deuxième guerre mondiale 1939-1945 a été exceptionnelle dans l'histoire économique. Il en sera peut-être aussi de même pour la croissance chinoise3. La situation actuelle résulte de la crise financière commencée en 2007 et qui atteint son paroxysme en 2009 avec des reculs du PIB en valeur dans la plupart des pays. Cette crise a été l'objet de multiples ouvrages d'économistes à travers le monde. Elle a donné lieu à des politiques de relance basées sur la politique monétaire. Aux États-Unis le quantitative easing de la Banque Fédérale et en Europe le LTRO ert maintenant le quantitative easing de la BCE.
La stagnation séculaire est un modèle explicatif de la crise économique actuelle qui affecte les pays industrialisés et par ricochet les pays en développement. Ce modèle s'apparente à celui de Keynes. Les propos de Michel Aglietta7 et de Nourriel Roubini5vont dans ce sens de même que ceux de Stiglitz et Walsh15.
La stagnation séculaire ou croissance faible analogue à celle du début de l'essor industriel du 19ème siècle (1-2%) est analysée comme une distorsion de l'épargne-investissement et du taux d'intérêt. Au lieu d'être transformée intégralement en investissement productif, une partie plus ou moins importante de l'épargne est stérilisée dans des placements financiers et bons d'État (*). Les taux d'intérêt sont faibles pour équilibrer une demande d'investissements faible avec une épargne abondante. Le danger est alors la formation de bulles et l'alternance de périodes de croissance molle et de bulles spéculatives. Et quand les taux d'intérêt sont faibles, la politique monétaire orthodoxe qui consiste à baisser le taux d'intérêt pour relancer l'activité conduit à des taux d'intérêt réels négatifs, ce qui accentue le risque de bulles6.
(*) Il n'y a que 3 façons de dépenser ses revenus: consommer, investir ou thésauriser.
La distorsion de l'épargne-investissement-taux d'intérêt provoque une demande globale - consommation-investissement (*) insuffisante qui entretient un taux d'inactivité structurel élevé d'une partie de la population active: jeunes et séniors et les moins qualifiés. L'économie s'installe alors dans un cercle vicieux que les mesures d'austérité exacerbent18.
(*) une observation supplémentaire est que les nouvelles technologies de l'information et de services utilisent moins de capitaux que les industries et les manufactures.
Les remèdes proposés par les tenants de ce modèle sont des investissements massifs de l'État dans les infrastructures, la transition énergétique et la formation des travailleurs7; financés par les déficits et/ou la taxation des plus riches réduisant ainsi leur propension à épargner, et une redistribution de revenus vers les catégories de la population les plus portées à consommer18.
Mais le concept de "stagnation séculaire" est controversé par d'autres économistes éminents. Notamment Ben Bernanke4 et 18. Bernanke dit que, grâce à la mondialisation des échanges désormais étendue au monde entier, il est possible de trouver ailleurs que dans son propre pays, des projets d'investissements productifs qui valent la peine, cad. dont le taux de rendement est supérieur au taux d'intérêt réel imposé au système bancaire par l'équilibre épargne-investissement. Le système de production consommation s'est étendu à la planète entière.
Justement, au moment où j'écris ces lignes, on apprend que l'Inde a commandé 36 Rafales à la France [Reuters]. S'ajoutant aux 25 déjà commandés par l'Egypte, l'entreprise de haute technologie Dassault va enfin travailler pour l'exportation de cet avion, alors que jusque maintenant elle travaillait pour l'État. [Actualités Rafale].
Three issues: Potential growth, effective demand, and sclerosis
Potential growth
Effective demand
Sclerosis
Mis en ligne le 08/04/2015 pratclif.com