Le premier bombardement eut lieu dans la nuit du 10
mai 1940. Pendant deux heures, une soixantaine de bombes de 50 à 250 kg
sont déversées sur Calais. Elles endommagent le port, le hangar Paul
Devot, la machinerie des écluses et une écluse du bassin Carnot. Le
remorqueur « Le Calaisien » est coulé dans son hangar.
Calais-Nord est aussi atteint : la Chambre de Commerce, les rues
Courtenveau, de Thermes et de la Douane.
Les bombardements vont se
poursuivre jusqu’à la prise de Calais le 26 mai, touchant le port et la
plage, les gares centrale et maritime, incendiant l’hôpital militaire, rue
Leveux. Les 25 et 26 mai, un enfer s’abat sur la Citadelle, les bombes
puis les obus des canons et des chars vont finir par ouvrir des brèches
dans ses remparts.
Premier retour des habitants : A partir du 20 juin,
les habitants de Calais-Nord seront autorisés à venir retirer leurs
affaires de leurs maisons dévastées : un programme sera établi par la
mairie avec la désignation des rues pour chaque jour.
La bataille d’Angleterre
Pendant les mois de septembre et d’octobre 1940, Calais va connaître une période de bombardements par les Anglais qui voulaient empêcher un débarquement allemand chez eux. Ces bombardements furent plus démoralisants que destructeurs car les Anglais ne disposaient pas de bombes de fort tonnage ni d’avions pour les transporter. Le premier raid eut lieu le 10 septembre contre le bassin Ouest dans le but de détruire les convois de chalands. Le Petit Courgain est aussi touché. Les avions reviendront jusque début octobre. Si les objectifs sont le port et ses bassins, Calais-Nord, la Nouvelle-France, le pont de Vic, les Fontinettes, le Centre-Ville de part et d’autre du boulevard Jacquard, seront atteints. Une bombe arrive dans la cour de l’hôpital Saint-Pierre, une autre sur la gare centrale. Des bombes incendiaires tombent autour du théâtre sans l’endommager. Ces bombardements auront coûté la vie à 39 Calaisiens et fait 48 blessés pour ne donner que de piètres résultats quant aux objectifs visés. Les Calaisiens n’en comprendront pas les raisons.
Les Calaisiens exaspérés
Les Calaisiens auront d’autres raisons d’être exaspérés. Dans la nuit du 7 au 8 décembre 1941, des bombardements australiens cherchent à atteindre Calais-Nord et le port mais le Centre-Ville, de part et d’autre du boulevard Jacquard, écope. Vers 7 heures du matin, une escadrille polonaise, au lieu de frapper le port va saupoudrer les quartiers de chaque côté du boulevard La Fayette. On dénombrera 28 tués et 50 blessés. Alors que le ciel est redevenu calme et que personne ne s’y attend, le 17 août 1943, les avions anglais lâchent leurs bombes sur Calais-Fontinettes et les quartiers environnants faisant 6 tués. Pourquoi ? Raid de diversion ou tir d’entraînement ? Les Calaisiens accepteront difficilement ces bombardements alliés.
Vers la libération
A partir de mai 1944, les bombardiers américains procédant
par tapis de bombes vont pilonner Calais et les communes environnantes, le
port et les défenses de la côte.
La gare des Fontinettes : Le 9 mai,
vers 10 h 55, soixante forteresses volantes vont s’attaquer à la gare des
Fontinettes apportant des destructions aux quartiers du bout des rues de
Valenciennes et des Fleurs : 42 bombes ont frappé les quartiers habités
des Fontinettes et des Cailloux. On compte 36 tués et 90 blessés, 300
maisons sont détruites. Le soir, le pilonnage reprend sur Calais-Nord, le
port, le Petit Courgain, le Beau-Marais.
Au Petit Courgain : Le 29 mai,
lundi de Pentecôte, jour de ducasse de quartier, de nombreux habitants
sont partis à la campagne : 150 bombes détruisent 50 maisons. Le 3 juin,
500 bombes tombent pendant une heure faisant 44 tués et 60 blessés dans le
quartier et aussi aux Cailloux et au Fort Nieulay, 100 maisons sont
détruites. Les avions reviendront le lendemain.
Au Pont-du-Leu :
Dimanche 25 juin, 12 h 30, il fait beau, c’est l’heure du repas. Deux
formations de 14 Liberators éparpillent 3 000 bombes explosives et
incendiaires sur les voies ferrées de Calais-Sud sur une diagonale allant
du cimetière de Coulogne à l’usine à Soie. Les voies de la ligne
Calais/Boulogne sont sectionnées. L’église de Coulogne est endommagée, le
cimetière éventré. Au Pont-du-Leu, 3 victimes sont à déplorer.
Les derniers jours
Les
bombardements reprennent le 22 septembre sur le Centre-Ville. Bombes et
obus tombent à nouveau sur Calais.
Le grand chambardement : Le 25
septembre, les quadrimoteurs canadiens, par vagues successives, lâchent 1
000 tonnes de bombes sur le Centre-Ville et le quartier
Saint-Pierre.
Un clocher disparaît du paysage : Le 26 septembre, 191
bombardiers s’en prennent à Calais-Nord, au bastion 2 et au Fort Nieulay.
Le bombardement est terrifiant. Après ce déluge de feu, « j’ai
l’impression qu’il manque quelque chose dans le paysage » dit Georges
Dauchard. Le clocher de l’église Notre-Dame, qui n’avait pas subi de
dégâts trop importants, est tombé et écrase dans sa chute la moitié de la
charpente de la nef sur quatre travées. Les transepts nord et sud sont
anéantis. Des tonnes de matériaux recouvrent les cloches. Quelles
conséquences encore si la bombe retrouvée au pied du retable avait explosé
?
La ville souffrira à nouveau le lendemain. Mais pourquoi recommencer
le 29 septembre alors que la veille le général Schroeder a accepté de se
rendre ?
Le 30 septembre, Calais est libérée, mais son martyr n’est pas encore terminé.
Le bombardement du 27 février 1945
Calais libérée, la ville reprend ses activités avec
le retour progressif de ses habitants. Le mardi 27 février, à 17 h 30,
heure de sortie des écoles et du travail, 48 bombes s’abattent sur le
quartier Saint-Pierre entre les rues de Valenciennes, Gaillard, Hermant,
et de la Commune de Paris. Ce bombardement atteint une population qui
panse ses blessures et qui n’a pas été prévenue par les sirènes. Le bilan
est tragique : 97 tués dont 16 enfants, 150 blessés, des dizaines de
maisons éventrées. Plusieurs corps volatilisés, ne seront pas
retrouvés.
Que s’est-il passé ? Les Anglais ont décidé de bombarder
Dunkerque toujours occupée. Partis de Vitry-en-Artois, 24 bombardiers font
demi-tour à cause du ciel bouché sur le littoral ; 6 autres atteignent
Dunkerque. La dernière escadrille aperçoit des toits à travers les nuages
et, sans autre vérification, lâche ses bombes sur Calais.
Des obsèques
émouvantes ont lieu le 3 mars, sur la place Crèvecoeur. Les cercueils sont
transportés au cimetière sur des camions prêtés par les Anglais. Les
Calaisiens évoquent toutes les hypothèses. Les autorités militaires ont
décidé de reporter l’information au lendemain des obsèques de peur des
manifestations de mécontentement de la population. Le 5 mars, le maire,
Jacques VENDROUX, reçoit un haut gradé de la R.A.F. qui apporte une
message exprimant « les regrets du Quartier Général Suprême des
forces alliées pour le bombardement de Calais effectué par erreur par des
bombardiers volant par temps couvert et ayant pris Calais pour
Dunkerque ».
Jacques VENDROUX publiera ce communiqué sans autre
commentaire et dira plus tard son étonnement devant le calme et la dignité
dont ont fait preuve les Calaisiens.
Created on ... août 18, 2003