Le jour de la déclaration de guerre le 3 Septembre 1939, nos parents soucieux de nous éviter des bombardements sur Calais, point stratégique car proche de l'Angleterre et de Dunkerque, nous évacuèrent provisoirement à ANDRES, (entre GUINES et ARDRES, chez Monsieur et Madame PARISSAUX, braves fermiers en retraite. Nous étions accompagnés de Mademoiselle VERMEULEN, qui habitait Calais-Nord. Nous sommes restés à ANDRES jusqu’à la rentrée de 1939. Notre père venait nous voir les week ends.
Comme le Pensionnat Jeanne d’Arc que fréquentait Françoise à Calais précédemment était replié à Wissant nos parents décidèrent de louer la villa « Arlequin » à Wissant. Nous y étions installés pour la rentrée scolaire, avec l'aide de la dévouée Mme Ceytaire notre gouvernante. Notre père venait nous voir tous la week ends.
Bernard suivait des cours avec quelques garçons chez Monsieur Tyr, ancien officier de Marine. Elisabeth et Brigitte n'allaient pas encore en classe. De nombreux Calaisiens et familles de Lille , Roubaix, Tourcoing se retrouvèrent à Wissant jusqu'en Mai 1940.
Vue la progression allemande, notre père décida de nous conduire à Aumale, le 19 Mai 1940. Maman était dépressive et fatiguée ; elle était accompagnée de Mademoiselle Amar , une amie de Calais.
Vue son affection spéciale à son poste à Calais, notre père fit le parcours Calais, Wissant, Aumale, Calais le même jour. L'avance allemande fut si rapide que à quelques heures près, notre Père n' aurait pas pu passer le pont sur la Somme, à ABBEVILLE, bientôt occupé par les allemands qui en interdisaient le passage.
A Aumale, tante Yvonne PONSOT arrivait à son terme, et restait très angoissée, aux bons soins de ses parents ; son mari était mobilisé. Ils durent fuir quelques jours plus tard, et trouver une maternité qui veuille bien accepter Tante Yvonne. C'est à Louviers qu'elle donna le jour à Françoise, le 22 Mai 1940.
Tante Rente Douriez-Schuman était arrivée à Aumale avec ses quatre enfants. Son mari était mobilisé au Chiffre.
Oncle Jean et Tante Marcelle ainsi que leurs deux jeunes enfants François et Odile décidèrent de quitter Aumale. Anne-Marie et Thérèse étaient en pension à DINAN où les Ursulines de Saint: Saulve (près de Valenciennes) étaient repliées.
Maman et ses quatre enfants, ainsi que les Douriez et les Jean Maincourt prirent place dans la voiture d'Oncle Jean, et dans une camionnette de la Société Prévost-Maincourt conduite par un employé qui emmenait femme et enfant (Monsieur et Madame FLAMENT et leur fils).
Le soir. nous avons dormi à Alençon sur la dure. dans le bureau d'une agence de Pompes-Funèbres. On avait trouvé une chambre chez l'habitant pour Maman accompagnée de Françoise. Nous avons fait étape à Dinan où nous avons retrouvé Anne-Marie et Thérèse Maincourt. La famille Douriez nous quitta pour Pornichet, où résidait André Schumann qui travaillait: à la société Shell. Il trouva un logement pour sa sœur à la Baule les Pins.
Grâce aux relations de Mademoiselle Amar, qui avait trouvé une location à Paimpol, avec grand jardin près du chenal, maison assez grande pour les trois familles (Jean Maincourt, Flament et nous). Puis Maman décida de se dissocier de la famille Maincourt. Mademoiselle Amar nous quitta, et nous nous installâmes au bourg de Batz. C'eut au cours du voyage Paimpol Batz que nous aperçûmes les premiers soldats allemands . Nous trouvâmes une location au premier étage de la villa « Les Korrigans » face à la mer. Nous voyions souvent les Douriez à la Baule les Pins, ainsi que Tante Yvonne et Françoise. Les trois dames étaient sans nouvelles de leur mari. Tante Yvonne faisait revivre son salon de thé difficilement à la Baule; nous lui apportions des biscuits pur beurre fabriqués Batz.
Françoise entre au collège Notre Dame qu'elle quittera pour aller au lycée en novembre 1941. Bernard entre au collège St Hilaire dirigé par un prêtre très sévère.
D'autres familles Calaisiennes se sont réfugiées à Niort: les Drujon (médecin), les Félicien Deguines (légion d'honneur avec Papa), ainsi que la famille Legrand, de Merville. La famille Robert Deroide, quincailliers en gros à Niort, ont accueilli les Calaisiens et les ont soutenus et aidés pour trouver des logements.
Maman était fatiguée et dépressive.
En avril 1941, notre père resté à Calais, vient nous voir à Niort. Nous avons du mal à le reconnaître à la gare tant il a maigri. Nous quittons le logement 122 boulevard Main et nous nous installons début mai 1941 dans une pension de famille, chez Mme Missant. En mai, Brigitte nous quitte pour Aumale chez nos grand-parents, ce qui soulage un peu maman.
En septembre, il y a éclatement de la famille. Notre père est à Niort du 17 au 23 septembre. Maman part à Frontenay Rohan Rohan avec Elisabeth chez des religieuses qui accueillent des personnes agées. C'est à Frontenay Rohan Rohan qu'Elisabeth ira en classe, pour la première fois.
Françoise loge chez des demoiselles rébarbatives à Niort et prend ses repas avec Bernard qui est pensionnaire chez Mlle Duclère. Françoise et Bernard vont souvent à Frontenay en vélo et en patins à roulettes. Ils y passent leurs vacances...
Maman quitte Frontenay Rohan Rohan pour l'hôpital de Niort en décembre 1941. Papa vient nous voir le 27 décembre.
En 1942, suite au décès de Mlle Duclère, Françoise et Bernard s'installent chez Mlle Delaveau, 15 rue du Général Largeau. Elisabeth reste à Frontenay mais elle peut être logée chez Mlle Delaveau pendant les vacances ainsi que papa quand il vient nous voir.
Il nous arrive de nous regrouper à Aumale pendant les vacances. Françoise et Bernard et Elisabeth retrouvent Brigitte.
Pendant les grandes vacances 1943 et 1944, le futur abbé Schuman, alors au séminaire des vocations tardives à Bordeaux, venait nous voir à Frontenay Rohan Rohan à vélo. Il était alors précepteur de la marquise de Poleon, dans un château à 18km de Frontenay Rohan Rohan. Avec lui nous avons fait une excursion mémorable au marais poitevin à vélo.
Maman fut prise en charge au château de Suresnes en 1943, où l'on constata une nette mais fugace amélioration.
La gare de Niort fut bombardée le 7 juin 1944.
Le 8 mai 1945 ce fut la victoire des alliés et la fin de la guerre.
Le 21 juillet, papa nous aide à déménager; nous retournons à Calais. Maman nous y rejoint. Elle reste mélancolique et dépressive; une opération est décidée en décembre 1948 pour venir à bout de cet état. loboctomie préfrontale qui risque d'entraîner un changement de sa personnalité. Mais, petit à petit maman reprend sa place dans la famille à la maison.