Le DDT, une aubaine puis un fléau

Synthétisé pour la première fois en 1874, le dichlorodiphényltrichloroéthane sort de l'anonymat en 1939 grâce à Paul Hermann Muller, qui découvre ses propriétés neurotoxiques pour les insectes en cherchant à mettre au point un insecticide non toxique, chimiquement stable et peu coûteux. Cette découverte majeure lui vaut le prix Nobel de médecine en 1948 pour sa contribution très efficace à la lutte contre les maladies transmises par les insectes.

Dès 1943, l'armée américaine utilise massivement le DDT pour enrayer une épidémie de typhus à Naples. À partir de 1945, on lance des programmes dans quarante-huit pays pour tenter d'éradiquer le paludisme. L'épidémie est enrayée en Grèce en une année; en Inde, on passe de 75 millions de cas à seulement 50000 en quinze ans; en Afrique du Sud, le nombre de cas est divisé par dix Le DDT à lui seul sauve des millions de vies humaines Symbole du modernisme, il est utilisé abondamment, voire abusivement, en agriculture.

Cependant, en 1962, la scientifique Rachel Carson observe que des oiseaux insectivores meurent en masse dans des zones où le DDT a été épandu. Dans son livre Le Printemps silencieux, elle tire la sonnette d'alarme à propos des pesticides et prédit la destruction massive des écosystèmes de notre planète.

On s'aperçoit alors progressivement des inconvénients majeurs de ce produit:

• sa « demi-vie n est de quinze ans, c'est-à-dire que si l'on en pulvérise 100 kg dans un champ, quinze ans après il en restera 50 kg ;
• il est dispersé et peut étre transporté dans l'atmosphère su r de longues distances : on en a retrouvé dans les neiges de l'Arctique;
• il est biocumulatif : les animaux qui en absorbent sans en mourir ne parviennent pas à l'éliminer et le stockent dans leurs graisses. Il se concentre alors tout au long de la chaîne alimentaire, y compris très loin des zones d'épandage, par exemple dans le corps des animaux polaires On en a finalement retrouvé en forte concentration dans le lait maternel;
• il fragilise les coquilles des oeufs en diminuant leur épaisseur, ce qui a entraîné le quasi-disparition d'espèces d'oiseaux comme les pygargues, les faucons pèlerins et les pélicans bruns;
• il est toxique par voie orale Une personne de 70 kg qui en absorbe 35 g (ce qui est cependant assez improbable) en meurt. Heureusement, il ne l'est pas par voie respiratoire ou cutanée. Les gens qui ont porté des vêtements imbibés de DDT pour se protéger des insectes n'ont pas été infectés. Mais il a surtout une toxicité chronique à long terme; la dose journalière admissible est de 1 200 ug (microgrammes) par jour.

En 1969, l'OMS a abandonné son programme d'éradication du paludisme par le DDT; fa France et les États-Unis l'ont banni en 1972 ; à la conférence de Rio de 1992, il a été désigné comme l'un des seize polluants organiques persistants interdits.

Cette règle tolère néanmoins des exceptions pour les pays qui en font la demande, comme l'Afrique du Sud et le Swaziland, soucieux de lutter de façon efficace contre les insectes vecteurs de maladies Selon eux, ce produit est utilisable en alternance avec d'autres insecticides, de façon à réduire le risque de résistance; il possède également un effet répulsif à long terme, ce qui permet de n'effectuer qu'une seule campagne par an au lieu de deux avec les autres.

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Mis en ligne 28/03/2010 par Pierre Ratcliffe. Contact: Portail: http://pratclif.com  paysdeFayence: http://paysdefayence.blogspot.com   mon blog: http://pierreratcliffe.blogspot.com