Réaction à propos du 7-9 de mercredi 9/2/05

J'ai bien apprécié votre relation de la conférence de presse de Hervé Gaymard et le fait vous ayez sollicité l'intervention de Christian de Boissieu, un expert objectif et crédible en matière d'économie. Permettez moi de réagir sur ce que j'ai entendu.

Les baisses d'impôts concernent les français les plus taxés, c'est à dire ceux qui paient des impôts sur les revenus, en plus de tous les prélèvements de l'Etat et des collectivités locales qui affectent presque tout le monde. Pour ma part, tous les revenus que je reçois sont dépensés dans l'économie marchande (biens et services) et en impôts directs dont celui sur le revenu (13% en 2004). Une baisse de cet impôt se traduira donc par une augmentation de ce que je dépenserai en biens et services marchands, ce qui contribuera à doper l'économie et l'emploi. Je note que les baisses d'impôts jusqu'ici (y compris celles initiées par le précédent gouvernement avec Fabius) ont été identiques pour tous, puisque toutes les tranches ont été affectées du même pourcentage de baisse. Il est question de moduler les baisses selon les tranches d'imposition et de favoriser davantage les tranches les plus basses....

Conditionner les baisses d'impôts à une croissance du PIB supérieure à 2.5% signifie que la production de biens et de services marchands doit croître encore plus puisque le PIB comprend la valorisation des services publics (Etat et collectivités locales). Puisque la pression fiscale est de 44% du PIB (selon définition et chiffres INSEE), le secteur marchand représente donc 56% du PIB et 2.5% de croissance nécessite donc 4.5% de croissance de la production de biens et services marchands, à volume de services publics constant. Ceci c'est sans tenir compte de toutes les taxes parafiscales et autres prélèvements qui n'entrent pas dans la définition et les calculs de l'INSEE... Si l'on en tenait compte, c'est plus de 6% qu'il faudrait atteindre. Cette croissance est partagée entre celle due à la demande intérieure et celle due à la demande extérieure.

Nous sommes donc dans un dilemme de poule et d'oeuf. En effet, doper la consommation de biens et de services marchands implique d'en produire plus (je viens de dire +4.5 à +6%), et en quantité telle que le recours à la productivité ne suffira pas mais qu'il faudra augmenter les moyens de production en équipements et en travail; c'est ce qui se traduira par une diminution du chômage. Atteindre ce but par la baisse des prélèvements, commençant par ceux qui sont les plus taxés, mais à condition que la production de biens et services marchands l'ait précédé, voilà bien le dilemme....

Notre situation résulte du fait que l'Etat dépense beaucoup plus que ce qu'il prélève, comme en témoigne le déficit public constant depuis 20 ans et la dette accumulée de 1000 milliards d'€. Les prélèvements réels sont ainsi beaucoup plus élevés qu'il ne paraît, et cela se traduit par les difficultés économiques et sociales que nous connaissons depuis deux décennies, chômage persistant de 10%, stagnation du pouvoir d'achat, montée des inégalités de toutes sortes, etc... L'Etat finance les dépenses excédentaires par des emprunts d'Etat, obligations ou ou bons du trésor, auxquels souscrivent les particuliers et les entreprises dotés de liquidités. Ces fonds sont généralement à plus de 7 ans et sont rémunérés au taux moyen des emprunts d'Etat (TME) actuellement #4%. Ces fonds sont ainsi utilisés pour les besoins de fonctionnement de l'Etat au lieu d'être utilisés pour l'investissement des entreprises ou de l'Etat pour les infrastructures.

Nous avons fait collectivement le choix d'un Etat providence mais nous voudrions aussi consommer tous les produits de l'économie moderne. Le débat doit donc porter sur cela: l'Etat peut-il être réduit, modernisé, plus efficace en coûts et qualité de ses services..... Profiter de la pyramide des âges au sein de la fonction publique et des départs en retraite de nombreux fonctionnaires, pour restructurer et moderniser les services de l'Etat, voilà me semble-t-il une voie à suivre pour réduire les dépenses publiques à commencer par le déficit. Mais l'effet de telles mesures, même si elles sont mises en oeuvre, ne se fera sentir qu'à long terme car les fonctionnaires en retraite restent à la charge du budget de l'Etat. Ce n'est donc que sur longue période (après la mort de ces retraités et de leurs conjoints) que la diminution du nombre de fonctionnaires se traduira par une réelle baisse des dépenses publiques.


Créé le 09/02/2005 par Pierre Ratcliffe (pratclif@free.fr)