FRANCE : Le cercle vicieux de l’ignorance économique

La pauvreté du débat concernant les questions économiques durant cette période électorale a fait réfléchir les médias, comme le prouve le dossier du Figaro en date du lundi 10 juin dernier. Ce dossier, qui essaie d'expliquer "pourquoi les Français sont fâchés avec l'économie", met le doigt sur les spécificités françaises culturelles, institutionnelles et idéologiques qui sont à l'origine du rejet du marché et de l'économie : éducation biaisée, de très nombreux fonctionnaires à l'abri des lois marchandes, des instituts et organismes économiques sous la coupe de l'Etat, un cadre institutionnel et fiscal hostile à l'initiative économique etc. Cette ignorance explique que les Français rejettent, contre leur propre intérêt, le marché et la liberté économique.

Des économistes célèbres ont déjà souligné que les idées menaient le monde. Un refus du raisonnement économiques et des idées, hostiles au marché, aboutissent indiscutablement à une incompréhension des phénomènes économiques modernes (mondialisation, délocalisations, nouvelle économie, Bourse et rôle des marchés financiers etc.). Cette incompréhension devient extrêmement grave quand elle est suivie, ce qui est pratiquement toujours le cas en réalité, de choix et d'actions politiques qui portent atteinte à la liberté économique (respect des droits de propriété et de la liberté des contrats) et qui sont sources de désordre pour les acteurs économiques.

Si les Français semblent fâchés avec l'économie, comme le constate le dossier du Figaro, c'est avant tout par ignorance des lois économiques et par manque de repères et de grille de lecture adaptée pour décrypter les phénomènes complexes d'aujourd'hui.

Les hommes de l'Etat, les fonctionnaires et un grand nombre de groupes de pression (syndicats, corporations etc.) ont intérêt à ce que les Français rejettent le marché. Ainsi, tout est fait et appuyé par la contrainte des pouvoirs publics afin qu'ils continuent à vivre dans l'ignorance.

  1. Les jeunes Français sont victimes déjà, dès leur enfance, d'un système éducatif "gauchisant", proche bien plus de la lutte des classes marxiste que de la coopération économique. La vision du monde qui leur est inculquée dans l'école publique française repose évidemment sur le conflit et l'action, présumée indispensable et omniprésente, de l'Etat dans les relations humaines. Avec de tels jeunes esprits déstructurés, il est bien sûr fort difficile de faire fonctionner une entreprise ou de faire passer une réforme qui donne "feu vert" à la libre initiative et au processus de marché. Cette déstructuration se poursuit à l'Université où les enseignants, comme le montre une étude, ont une opinion anti-économique aussi prononcée que des étudiants en Lettres qui n'ont jamais fait d'économie (voir l'étude de Lemennicier, Marrot et Setbon dans le Journal des Economistes et des Etudes Humaines, Vol. 1, N°1, Hiver 1989-1990).
  2. Un grand nombre de Français ne sont tout simplement pas incités à avoir un raisonnement économique parce qu'ils sont à l'abri de la concurrence et des lois du marché. Il s'agit de tous les fonctionnaires et des agents de la fonction publique qui non seulement n'ont aucun intérêt à se mobiliser pour la mise en place d'institutions marchandes, mais qui donnent aussi l'illusion que l'opinion publique demande toujours plus d'Etat et toujours moins de marché.
  3. À la différence des Américains, les Français ne sont pas incités par le système fiscal, réglementaire etc., mais aussi par une tradition culturelle qui regarde de "mauvais œil" les marchés financiers, à jouer à la Bourse ou à créer leur propre entreprise (voir notre article du 21 janvier dernier sur la frustration de 14 millions d'entrepreneurs potentiels en France). Or, quel meilleur apprentissage que de vivre la loi de l'offre et de la demande et d'acquérir directement une expérience économique concrète, "sur le terrain" ?
  4. L'information économique, qui est relayée par les médias "façonnant" finalement les opinions et les idées de chaque Français, est contrôlée par des instituts de réflexion et des organismes économiques publics (Insee, Conseil économique et social, le Plan, Commissariat général du Plan, Observatoire français des conjonctures économiques etc.), subventionnés par l'Etat, dans lesquels règnent souvent un mélange de marxisme et de jacobinisme. De plus, ce système de contrôle public permet également d’oublier des dossiers et des études gênants pour les pouvoirs publics et le gouvernement.

En conclusion, l'environnement culturel, éducatif, institutionnel etc. dans lequel vivent les Français les encourage à refuser les lois économiques et à faire appel à l'Etat. Malheureusement, l'omniprésence de l'Etat aboutit à rejeter encore plus le marché et la liberté économique.