hausse du prix du pétrole; les implications.

Retraites, pouvoir d'achat, sécurité sociale, emploi, globalisation, déficit des comptes publics et réformes de l'État... tels sont, pêle-mêle, les sujets d'actualité en France et en Europe. L'augmentation du prix du pétrole se rattache à tout cela et occupe la une de tous les journaux. Quelle en est l'implication pour chacun de nous?

La hausse du prix du pétrole a de multiples causes dont le poids respectif est mal connu; mais de très loin la cause première est l'ajustement de l'offre et de la demande sur le marché mondial par le prix. La raison est que, durant la dernière décennie et particulièrement au cours des 5 dernières années, la demande mondiale a considérablement augmenté avec la croissance économique mondiale, notamment en Asie - Chine et Inde - en Amérique - Nord et Sud - en Russie et en Europe. Face à cette croissance, la production et l'offre de pétrole a peine à suivre; du coup, l'ajustement se fait par les prix. Ce sont les pays producteurs, à travers leurs compagnies nationales de production, et les majors, producteurs de pétrole, les EXXON, BP, SHELL, TOTAL et autres, qui sont les bénéficiaires de cet ajustement de l'offre et de la demande par la hausse des prix du pétrole brut. On assiste ainsi à un nouvel épisode de formidable transfert de ressources des pays consommateurs vers les pays producteurs. Voir par exemple Dubai démesure extrême. Voir ici carte des pays producteurs de pétrole. Et ce qui est important de noter c'est que les "majors" ont une part faible dans la production totale mondiale (voir ici), et une part plus faible encore dans les réserves (voir ici).

La meilleure étude sur la situation du marché mondial du pétrole en 2008 que j'ai trouvée est ici (anglais).

La très forte hausse du prix du pétrole implique forcément pour les pays consommateurs comme la France, une hausse des coûts de production de l'ensemble des biens et services de l'économie. Cette adaptation correspond à la diffusion de la hausse du pétrole dans l'économie par les prix et se traduit par de l'inflation. Voir ici. L'adaptation à cette hausse ne peut se faire, dans un premier temps, que par une baisse du pouvoir d'achat de l'ensemble des agents économiques. Mais comme toujours, c'est la manière dont cette baisse de pouvoir d'achat est répartie, qui est le principal problème à règler par le gouvernement. Voir ici les statistiques Eurostats jusqu'en 2007 compris.

Dans un deuxième temps, l'adaptation va consister à trouver des solutions techniques et d'organisation pour produire la même quantité de biens et de services avec moins de pétrole. Nous devrions donc augmenter notre productivité pour préserver notre pouvoir d'achat. Augmenter le pouvoir d'achat de l'ensemble des français nécessiterait de produire plus de biens et de services avec la même quantité de pétrole qu'actuellement.

La hausse du pétrole se diffuse à travers l'économie par l'inflation des prix - 3.7% en Europe en mai 2008. Certains comparent cette inflation à celle que nous avons connue dans les années 1970 et début 1980. Cela n'a rien de comparable. Ces années là, nous avions une spirale inflation/salaires qui suivait tant bien que mal l'augmentation de la productivité et de la production de biens et services offerts à tous. Les prix de vente entre les entreprises comportaient des formules de révision basée sur un ou plusieurs indices des prix, et l'inflation était à deux chiffres (nous avons atteint les 15%). Le processus n'a été stoppé que dans la deuxième partie des années 1980. Cette inflation profitait aux emprunteurs à taux fixes, lesquels voyaient la charge de leur dette (intérêts et capital) diminuer, avec les augmentations de salaires successives. Aujourd'hui l'inflation est liée à l'augmentation réelle du prix du pétrole (et des matières premières, dues en partie au pétrole, mais à d'autres causes); il serait illusoire de compenser cette hausse par un accroissement des salaires préalable ou non justifié par un accroissement de productivité. La BCE y veillera et augmentera le taux de base de l'intérêt si nécessaire.

Mais le pétrole a d'autres aspects liés qui compliquent la compréhension. C'est d'abord le réchauffement climatique par les gaz à effet de serre; c'est ensuite les réserves et la crainte qu'un jour ou l'autres elles s'épuisent, que la production diminue, ou qu'il faudra exploiter des réserves plus difficiles d'accès et plus coûteuses à exploiter. Conjugués à la croissance de la demande, notamment pour alimenter la croissance économique dans les pays d'Asie et dans les pays pauvres, ces aspects renforcent l'idée que le pétrole va devenir plus rare et plus cher. Nous devrons donc continuer de nous adapter, en baissant notre consommation de produits et services non indispensables, en améliorant nos techniques pour produire avec moins d'énergie pétrole et réduire notre dépendance par le développement d'énergies alternatives y compris le nucléaire.


Mis en ligne le 18/06/2008 par Pierre Ratcliffe. Contact: (pratclif@free.fr) sites web http://paysdefayence.blogspot.com et http://pratclif.com