La violence urbaine dans les banlieues défavorisées de Paris

Trouble et Perplexité

Réseaux mafieux, islamistes: «Ces émeutes n'ont rien de spontané», dénonce la droite. Les sociologues et les juges sont plus nuancés.

Ces émeutes n'ont «rien de spontané», selon le ministre de l'Intérieur, Sarkozy. Elles sont le fait de «bandes organisées», d'après le Premier ministre, Villepin. Elles sont orchestrées par «un certain nombre d'agitateurs, de provocateurs» qui «veulent utiliser la période tendue» actuelle, aux dires du député UMP de Seine-St-Denis, Eric Raoult. Elles relèvent d' «une forme de terrorisme urbain mené par une minorité de caïds qui ont un intérêt financier, comme le trafic de stupéfiants, ou idéologique, comme des islamistes radicaux», aux yeux du syndicat policier, Synergie.

De fait, nul ne doute de la présence dans les cités de délinquants de droit commun qui doivent avoir intérêt à ce qu'elles demeurent des zones de non-droit. Et l'armement utilisé par certains émeutiers a de quoi troubler, comme le fait que, souvent, des jeunes n'habitant pas les cités dévastées ont participé à leur embrasement.

Les sociologues et spécialistes du terrain relèvent toutefois que les émeutiers agissent en groupes réduits, soudés et mobiles, sont souvent meilleurs connaisseurs du terrain que les policiers, fréquemment encore bien trop jeunes (moins de 10 ans, parfois!) pour être déjà embrigadés et/ou fanatisés: autant de facteurs qui plaident pour leur ancrage local et leurs motivations sociales. Les présenter comme à 100 pc instrumentalisés reviendrait aussi à minimiser l'ampleur des problèmes réels (emploi, logement, rupture scolaire, violences policières, propos du ministre Sarkozy, etc.) susceptibles d'expliquer leur colère. Ce qui n'exclut pas des connivences et des regroupements fortuits -via des blogs sur Internet, par exemple, qui semblent ici jouer un rôle dans la mobilisation des fauteurs de troubles.

Au demeurant, amenés à juger les émeutiers en comparution immédiate, les juges se sont bien gardés jusqu'à présent, faute d'éléments probants, à condamner ces jeunes pour autre chose que des faits de violence commis en réunion -sans donc la moindre connotation annexe qui étayerait la thèse de l'entreprise à caractère criminel, idéologique ou terroriste.