Violences urbaines: le gouvernement cherche une issue


Le gouvernement a multiplié les consultations vendredi pour tenter de trouver une issue aux violences urbaines dans les banlieues pauvres autour de Paris et en province, qui ont repris avec encore plus d'ampleur dans la nuit, la neuvième consécutive, avec l'incendie de plus de 754 véhicules et l'arrestation de 203 personnes.

Samedi matin le procureur général de Paris Yves Bot a indiqué que 897 véhicules avaient été incendiés dans la nuit dont 656 en Ile-de-France. Les forces de l'ordre ont procédé à 203 interpellations. Ce bilan est le plus important depuis le début des émeutes le 27 octobre.

Aucun affrontement n'a en revanche été relevé, ce qui confirme la stratégie d'évitement de la confrontation avec les forces de l'ordre adoptée depuis la nuit précédente par les jeunes des banlieues. La veille, plus de 500 véhicules, dont 77 en province, avaient été incendiés. Depuis le début des émeutes le 27 octobre, plus de 1.500 véhicules ont été brûlés dans la région parisienne.

Les forces de l'ordre ont procédé à beaucoup plus d'interpellations. "C'est le résultat d'une action policière qui porte ses fruits", selon le directeur général de la police nationale (DGPN), Michel Gaudin. Comme les nuits précédentes, des institutions publiques (établissements scolaires, mairies, commissariats, camions de pompiers) et des intérêts privés (commerces, entrepôts,...) ont été pris pour cibles.

De son côté, le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy a effectué une courte visite-surprise à la direction départementale de la sécurité publique des Yvelines à Viroflay, près de Versailles (ouest de Paris). Le trafic d'une ligne de train de banlieue reliant la capitale à l'aéroport international Charles-de-Gaulle était fortement perturbé vendredi, des conducteurs ayant arrêté le travail, craignant pour leur sécurité.

Les violences se déroulent dans les banlieues pauvres du pays où des jeunes Français d'origine immigrée du Maghreb ou d'Afrique, notamment ceux de confession musulmane, se sentent exclus de la société française.

Un responsable syndical policier, Bruno Beschizza, a dénoncé une "nouvelle forme de terrorisme urbain" d'une "minorité de caïds ayant un intérêt financier ou idéologique" dans les cités. "Des islamistes radicaux" ont "entraîné et manipulé des jeunes" au début des violences qui ont éclaté après le décès dans des circonstances floues de deux mineurs à Clichy-sous-Bois, a affirmé ce policier. Un autre responsable policier a cependant assuré qu'il n'y avait pas de "main invisible islamiste" derrière ces violences.

Confronté à sa plus grave crise depuis sa prise de fonctions en juin, le Premier ministre Dominique de Villepin, qui prône dialogue et fermeté, veut mettre en place, d'ici à la fin du mois, un "plan d'action" pour les banlieues. La France compte 750 zones urbaines sensibles. Il s'est notamment entretenu avec le ministre de l'Intérieur et a reçu 16 jeunes de "tous horizons" venus des quartiers sensibles.

Beaucoup de jeunes émeutiers réclament la démission de M. Sarkozy, qui avait promis, avant le début des violences, de "nettoyer au Kärcher" (puissant jet d'eau) les banlieues des voyous, les qualifiant de "racaille". Des habitants des banlieues touchées se disaient, eux, exaspérés par cette guérilla, surtout ceux qui ont vu leurs locaux de travail incendiés.

"Le problème, c'est qu'ils touchent des gens qui sont comme eux. Qu'ils aillent cramer là où il y a de l'argent", lance Caroline Bourré, qui habite un quartier pauvre. Le montant des dégâts sur les biens publics s'élève déjà à près de 7 millions d'euros en Seine-Saint-Denis, le département le plus touché par les violences, selon une mutuelle d'assurance. La presse européenne estimait vendredi que ces émeutes révélaient l'échec de l'intégration des populations d'origine immigrée en France.