Islamisme, nouveau totalitarisme
de Alexandre Del Valle : le totalitarisme Islamique éditions des Syrtes 2002

L'idée majeure de cet essai est que l'islamisme n'est pas un simple intégrisme mais un totalitarisme s'appuyant sur le fondamentalisme religieux. La première objection formulée contre l'emploi du terme totalitarisme consiste à rappeler que cette notion est apparue en fonction des réalites circonstanciées et isolées qu'étaient le national socialisme ou le stalinisme. L'autre objection, plus courante et liée à la première, consiste a rappeler que le totalitarisme est nécessairement incarné dans un Etat. Rappelons que ce concept a éte employé pour la première fois par Benito Mussolini et l'idéologue fasciste Giovanni Gentile dans L'Encyclopédie italienne pour définir le système dans lequel l'État est tout, donc total(itaire), au sens littéral du terme. Le simple bon sens permet d'invalider ces objections par le fait qu'un système totalitaire, même défini à l'aune du critère étatique, a forcément existé préalablement à l'état idéologique et abstrait avant de s'incarner dans un État. On peut ainsi, comme le suggère Pierre André Taguieff, considérer le totalitarisme sous trois formes et acceptions, plus complémentaires qu'antinomiques, en reprenant la classification que Renzo De Felice a entreprise concernant le fascisme : le fascisme comme mouvement, le fascisme comme régime et le fascisme comme idéologie.

Si l'on applique cette triple classification à l'objet de notre étude, on peut distinguer le totalitarisme comme mouvement, avec la généalogie des fascismes et du marxisme et leur incubation totalitaire aux X1x~ et W siècles, le totalitarisme comme régime avec les régimes nazi, soviétique, maoiste, khmer rouge, saoudien, taliban, khomeyniste ou soudanais, enfin le totalitarisme comme idéologie avec le marxisme léninisme, le stalinisme, le national-socialisme ou l'islamisme. L'idéologie islamiste transparait dans la doctrine totalitaire des Frères musulmans, du Jamiat-i-islaini pakistanais, de la révolution chiite iranienne ou du wahhabisme saoudien - dont le néo-wahhabisme révolutionnaire de Ben Laden - ou, plus généralement, dans le salafisme sunnite, sous ses formes fondamentalistes et djihadistes. La définition générique du totalitarisme comme prétention doctrinale, idéologico-politique à englober la totalité de la vie dans un monisme du pouvoir et de la vision du monde, en usant notamment de l'arme de la terreur et de la violence, est d'après nous la plus adéquate a définir l'islamisme, principal représentant aujourd'hui de la réalité totalitaire.

Après avoir éte initialement formulé dans son contexte fasciste, le concept de totalitarisme a été dans un second temps «dépraxisé» et étudié par tout un courant sociologique et politologique d'inspiration libérale représenté notamment par Friedrich von Hayek, qui y voit une réalité dépassant largement le fascisme italien et désignant de façon encore plus exacte le national-socialisme allemand et les socialismes (marxisme-léninisme, stalinisme, étatisme, etc.). Pour les libéraux, le totalitarisme est donc à la fois une idéologie et une praxis qui S'opposent irréductiblement au système libéral. Ici, le totalitarisme a vocation à s'incarner dans un Etat omnipotent, mais il est surtout caractérisé, ainsi que l'explique Friedrich von Hayek dans La Route de la servitude (1945), par son « constructivisme » dont les socialismes et les systèmes d'États hypertrophiés en général, offrent les meilleurs exemples. Or, si l'on considère l'idéologie islamiste, le fait qu'elle ne soit pas encore incarnée dans des États islamiques, sinon marginalement comme en Arabie Saoudite, au Pakistan, au Soudan, dans onze États du Nigéria, en Mauritanie ou en Afghanistan, n'empêche aucunement de l'affilier au phénomène totalitaire dans la mesure où elle appelle à l'édification d'un Etat islamique (dawla islamiyya) fondé sur le Coran et la charia, régissant puis contrôlant tous les aspects de la vie publique, sociale et privée, caractéristiques mêmes de l'État totalitaire. Certaines variantes du projet islamiste prévoient, en réponse pertinente et spécifiquement islamique à la mondialisation occidentale, la suppression des États nations traditionnels qui sont contraires au principe d'universalité de l'Islam, puis l'édification, à terme, d'un État califal transnational regroupant tous les membres de l'oumma islamique, la communauté des croyants. Tel est par exemple le projet d'Oussama Ben Laden et des organisations salafistes issues des Frères musulmans (Gamaa, Djihad, Takfir, etc.), et même des opposants saoudiens néowahhabites, partisans d'un retour à l'islam califal et conquérant de Mahomet.

Le troisième moment de la conceptualisation du totalitarisme a été incarné en particulier par Raymond Aron et Hannah Arendt, qui l'ont défini comme l'exact oppose des démocraties libérales qu'Aron a nommées « systèmes pluralistes-constitutionnels », et que Karl Popper a baptisées « sociétés ouvertes ». En ce sens, et ne serait-ce que par opposition à ces systèmes qu'elle rejette radicalement, l'idéologie islamiste, loin d'être un simple intégrisme, appartient d'emblée à l'univers totalitaire. Pour Aron comme pour Arendt, ou même d'autres grands politologues, plusieurs critères généraux permettent de définir le totalitarisme :

- L'indistinction entre les domaines de la politique et de la société civile - comme de l'économie et de la politique - qui se décline, en Islam, dans la confusion entre le temporel et le spirituel. L'État y est total, absorbant. D'après nous, bien qu'il n'aurait pas donné lieu à un examen particulier chez Aron ou Arendt, le refus total de toute forme de laïcité, propre au système islamiste, doit être considéré comme l'un des critères du totalitarisme dans la mesure où, comme l'a montré le politologue italien Giovanni Sartori, la sécularisation est l'une des conditions essentielles des régimes démocratiques et libéraux.

- La mobilisation totale et permanente, la fuite en avant dans l'extêmisme, d'où l'idée de révolution permanente chez les penseurs postjacobins et marxistes comme chez les adeptes du khomeynisme ou des mouvances salafistes-djihadistes centrées sur l'impératif de conquête du monde par le djihad permanent, imposé par le message prophétique jusqu'à soumission totale de l'humanité au lois d'Allah. Ce critère est central pour Sigmund Neumann qui explique, dans Permanent Revolution (1940), que le but premier du totalitarisme est de « perpétuer et d'institutionnaliser la révolution ».

- La militarisation non soumise aux normes de l'État de droit et la disparition de la distinction guerrier/soldat. Là aussi, comme les corps francs ou autres ordres du type SA et SS, l'islamisme invite tout croyant à remplir son devoir « d'effort de guerre sur le sentier d'Allah » (djihad fi sabil'Illah) contre les ennemis de l'ordre islamiste, la récompense étant le paradis d'Allah, l'équivalent du Wallalah des nazis néopaiens. Impératif que les mouvances djihadistes plus ou moins issues des Frères musulmans ou du Jamiat-i-Islami pakistanais (Takfir, Gamaa, Djihad, Hamas, GIA, GSPC, Lashkari-Taiba, Jeish-i-Muhammad) ont poussé jusque dans ses plus terribles retranchements en appelant les musulmans du monde entier à « tuer les juifs et les croisés partout où ils se trouvent ». Ceci explique pourquoi des terroristes kamikazes s'improvisent parfois en dehors de toute structure organisée, ainsi qu'on l'a vu en France fin 2001 avec l'affaire de l'islamiste de Béziers, Safir Bghouia.

- Le rejet de l'individualisme. Louis Dumont a défini les totalitarismes comme des systèmes « holistes », c'est-à-dire des systèmes où l'individu n'a aucune liberté de conscience, d'expression et d'action. Totalement étouffé et englobé par la collectivité, sa vie et sa dignité humaines n'ont aucune valeur, puisque seul le groupe compte. Cet aspect est encore plus présent dans l'islamisme que dans les fascismes ou le communisme, le leitmotiv des islamistes étant: Nous aimons plus la mort que vous la vie.

- La terreur et la peur généralisée. Dans son essai Démocratie et Totalitarisme, Raymond Aron explique que le régime totalitaire repose sur un parti monopolistique armé d'une idéologie révolutionnaire et sur un Chef, qui imposent leur foi au moyen de la terreur. Même si le système du parti politique, fondamental dans l'islamisme chiite (hezbollah veut dire « parti de Dieu »), est peu prégnant dans l'univers islamiste sunnite, on retrouve le couple foi/terreur, indépendamment du fait qu'il s'exprime dans un parti totalitaire classique comme en Iran, dans une junte comme au Soudan ou dans une structure tribalo-monarchique comme en Arabie Saoudite.

- La fin justifie les moyens et le mensonge est un devoir. Raymond Aron et Robert Conquest ont montré que le fanatisme doctrinal et la terreur se combinent fort aisément et avec une extrême flexibilité dans la tactique et dans la pratique pour conquérir le pouvoir, d'où le recours permanent au mensonge et a la subversion. « Les fanatiques acceptent non seulement la terreur mais aussi le mensonge, les deux caractéristiques de l'idée absolutiste », explique Conquest, car à la différence d'un intégrisme religieux classique, le totalitarisme n'est pas une morale à respecter mais un système de pouvoir absolu au service du triomphe, où tous les moyens peuvent être utilisés, y compris les plus bas et les plus immoraux. Seul le but ultime est moral, « la fin justifie les moyens ». On se souvient de la façon dont les nazis parvinrent au pouvoir après avoir utilisé des techniques subversives comme l'incendie du Reichtag ou l'instrumentalisation du christianisme, qu'ils détestaient pourtant, ou encore de la façon dont les communistes soviétiques distinguaient la vérité supérieure (pravda), idéologique, de la vérité factuelle (istina), sacrifiable a merci. Pouchkine écrivit d'ailleurs : « Le mensonge qui nous élève m'est plus cher que la masse des petites istina... » Aussi, plusieurs grands penseurs et juristes de l'islam classique auxquels se réfèrent les islamistes ont-ils eux aussi théorisé le « mensonge pieux », ou « ralliement des coeurs » (taalib al-qulub), et l'ont essentiellement destiné à ceux que Lénine nommait les « idiots utiles » : « Les mensonges sont des pèchés, sauf quand ils sont dits pour le bien-être d'un musulman » (AI-Tabarani) ; « le mensonge verbal est autorisé dans la guerre » (Ibn Al-Arabi) 7 . Dans le chiisme, on retrouve le principe de la taqiyya, qui autorise le croyant à renier publiquement sa foi en contexte hostile, tandis que le salafisme sunnite se réfère au mensonge de circonstance : « Il est permis de mentir pour repousser un mal plus grand. Le mensonge est laid mais il peut s'utiliser pour le bien. On peut mentir à un kafir (infidèle) en dehors de la guerre pour s'assurer un intérêt matériel », explique-t-on aux jeunes militants islamistes, le mensonge étant ici assimilé à une oeuvre de piété autant qu'à un djihad, car « le djihad doit être mené en utilisant la ruse et la tromperie contre les chefs kafirs, ceux qui attaquent ce que Dieu a révélé. Ibn Taymiyya a dit qu'il est permis, que c'est même un devoir pour un musulman, dans certains cas, de ressembler aux « associateurs » dans les choses extérieures telles que la tenue vestimentaire et autres apparences'.

Puisque seule l'expansion de l'Islam importe, tout moyen doit être employé pour atteindre ce but, y compris des manquements a certains préceptes islamiques et l'adoption de tenues « décadentes ». Ce qui.explique pourquoi une partie des kamikazes recrutés en Europe consomment de l'alcool ou ont des cheveux longs.

- L'idéocratie ou le fanatisme idéologique. Raymond Aron, Karl Popper et Hannah Arendt ont accordé une attention toute particulière au rôle fondateur de l'Idée, comprise comme idéologie et idéocratie, ou principe du pouvoir totalitaire fondé sur une vision unique et absolue du monde. C'est ainsi que Robert Conquest définit le totalitarisme comme un « subjectivisme idéologique poussé à l'extrême, dans lequel la machinerie de l'État sert avant tout à imposer l'idée du dirigeant ou du groupe à une société récalcitrante ou réfractaire' ». Comme l'ont montré Karl Popper ou Raymond Aron, ce qui caractérise le plus profondément le totalitarisme, ce n'est pas uniquement la violence et l'hypertrophie d'un État liberticide mais l'idéologie elle-même, entendue au sens étymologique du terme comme la logique dune idée totale, le fait d'expliquer le mouvement de l'histoire comme un processus unique et cohérent déduit a partir d'une idée centrale : la loi de la nature et de la race pour le nazisme, de l'histoire ou de la lutte des classes pour le marxisme, ou encore de la soumission de l'humanité à Allah, et donc la lutte des religions et des civilisations pour l'Islamisme. Dans La Société ouverte et ses ennemis et Misère de l'historicisme, Karl Popper a expliqué que l'idée absolutisée et « l'historicisme » - doctrine selon laquelle des lois générales infaillibles rendraient le cours de l'histoire inevitable et prévisible - sont les principales matrices du totalitarisme. Aussi, Popper a-t-il vu en Platon, Hegel et Marx, les trois grands idéalistes et « historicistes », les pères philosophiques du totalitarisme, Platon, en tant que philosophe de l'Idée créatrice suprême, ayant imposé le postulat d'une Idée-Vérité fondée sur Dieu (theos) a laquelle les hommes doivent se soumettre. Le célèbre philosophe grec partait du fait que, pour être heureux dans la cité, les hommes devaient obéir totalement à Dieu et aux coutumes régentant tous leurs comportements. Ce postulat philosophique « ontothéologique » de base de la pensée totalitaire (Heidegger), décelé par Popper, trouve un écho saisissant au sein du totalitarisme islamiste où l'idée de Dieu est également tout : « Allah est le plus grand » (Allah ou Akbar). « Il ordonne aux hommes, à travers le Coran et la charia, tout ce qu'ils doivent faire pour vivre en conformité totale avec les lois de l'Univers. » Du monisme idéocratique découle, selon Popper, l'impératif de constitution d'un « homme nouveau », que l'on retrouve aussi bien chez Marx, Lénine, Staline, Mao, Pol Pot, que chez l'ayatollah Khomeyni et dans l'Islamisme en général, à travers l'idée centrale d'unicité absolue (tawhid), particulièrement présente dans le hanbalisme, le wahhabisme et le salafisme, références privilégiées des islamistes surinites.

LA OUMMA OU LE LEBENSRAUM PLANÉTAIRE DES ISLAMISTES

La doctrine nationale-socialiste avait défini le concept de Lebensraum comme étant « l'espace vital » nécessaire à la survie et au déploiement du peuple aryen, avec ses surplus démographiques et ses minorités installées en Europe de l'Est et ailleurs qu'il s'agissait de réunir au moyen d'un Anschluss en un seul Reich allemand impérial (Autriche, Sudètes, Pologne) en plus des conquêtes des contrées slaves de Russie et d'Ukraine peuplées d'ethnies esclaves. Le totalitarisme vert a une vision encore plus large de l'espace vital, puisqu'il ambitionne d'élargir l'entité totalisante qu'est la oumma, le Lebensraum islamique, a toute la planète, de conquérir et soumettre le monde entier. Admirateur d'Hitler et de Mussolini, l'idéologue pakistanais Mawdoudi, dont la doctrine continue également d'être l'une des sources d'inspiration majeures des islamistes contemporains, a parfaitement mis en lumière la nature universaliste et néototalitaire du projet islamiste, véritable impérialisme théocratique à prétention planétaire : « L'Islam veut et requiert la Terre afin que toute la race humaine puisse jouir du concept et du programme Pour le bonheur humain. Afin de réaliser ce désir, l'Islam veut utiliser tous les moyens et toutes les forces utilisables pour faire advenir une révolution universelle globale. Cette lutte à long terme qui, en Permanence, mobilise et puise toutes les forces et cette utilisation de tous les moyens possibles s'appelle le djihad". » L'universalisme radical du totalitarisme islamiste transparaît aussi de façon éclatante dans la pensée du fondateur des Frères musulmans, Hassan al Banna : « De même que l'Islam est une foi et un culte, il est une Patrie et une citoyenneté qui annule les différences d'appartenance des hommes entre eux. Ainsi, l'Islam ne connaît pas de frontières géographiques, ni de différence raciale, ni civique. Il considère que tous les musulmans sont une unique communauté-nation, et que la patrie musulmane est une patrie unique, aussi éloignées que soient ses diverses provinces". » Foncièrement transnational, l'Islamisme est un « totalitarisme paradoxal », porté par ce que Pierre-André Taguieff nomme une « mauvaise mondialisation ». Bref, si le premier totalitarisme « brun » (national-socialisme et fascisme) était statolâtre, nationaliste et raciste, si le « rouge » était antireligieux et internationaliste, le totalitarisme « vert » est à la fois raciste (racisme religieux et civilisationnel), internationaliste, impérialiste et théocratique.

« L'UR-FASCISME » OU « FASCISME VERT » LE TOTALITARISME RÉACTIONNAIRE PAR EXCELLENCE

Dans un cours donné à l'université de Columbia, Umberto Eco a défini treize points qui, selon lui, sont constitutifs du totalitarisme de type réactionnaire ou religieux, et qu'il nomme « Ur-fascisme », ou le « fàscisme des origines :

1. L'affirmation selon laquelle « la vérité a été proférée une fois pour toute et l'on ne ferait qu'interpréter son message obscur ». Point qui décrit parfaitement le dogme du Coran « incréé », parole même d'Allah ayant tout expliqué avec les hadiths, en vertu duquel toute innovation (bida'a) n'est que déviation. Les points suivants semblent avoir éte spécialement conçus pour Ben Laden, les talibans et les wahhabites en général, dont le vénéré chef supreme Bin Baz déclarait, peu avant sa mort, en 1999, que « la Terre est plate, celui qui déclare qu'elle est sphérique est athée et mérite une punition" ».

2. « Le traditionalisme implique le rejet du modernisme. L'ère des Lumières et de la Raison est perçue comme le début de la dépravation moderne. »

3. « L'irrationalisme s'appuie sur le culte de l'action pour l'action. Penser est une forme d'émasculation. »

4-5. « Pour l'Ur-fascisme, la désapprobation est une trahison; désapprouver est un signe de diversité. Or l'Ur-fascisme cherche à réunir un consensus en exploitant et en exacerbant l'inquiétude naturellement éprouvée à l'égard de la différence. » D'où l'intolérance envers les non-musulmans et la punition de mort pour l'apostasie (ridda).

6. « L'Ur-fascisme découle d'une frustration individuelle et sociale. » Ce qu'a magistralement expliqué un « repenti » du mouvement salafiste égyptien Gamaa islamiyya, Khaled al-Berry, dans son livre-témoignage "La terre est plus belle que le paradis".

7. « À la racine de la psychologie Ur-fasciste se trouve l'obsession du complot. Le moyen le plus facile de déjouer cette conspiration est de faire appel à la xénophobie. Les juifs constituent la cible idéale parce qu'ils ont l'avantage d'être à la fois intégrés dans la communauté et situés hors de celle-ci. » L'appel général de Ben Laden, du Hamas ou du Hezbollah à « tuer les juifs et les croisés partout où vous les trouverez » obéit directement à cet impératif.

8-9. « Pour l'Ur-fascisme, on ne lutte pas pour vivre mais on vit plutôt pour lutter. La vie est un effort de guerre permanent. » D'où le djihad qui signifie littéralement « effort de guerre ».

10. « Chaque citoyen appartient au meilleur peuple du monde. » Ce que confirme le Coran : « Vous êtes la meilleure communauté qu'on ait fait surgir pour les hommes » (3-110).

11. « Le culte de l'héroïsme est étroitement lié au culte de la mort. L'Ur-fascisme aspire à la mort proclamée comme la récompense sublime pour une vie héroïque. Le héros Ur-fasciste est impatient de mourir. » Peut-on mieux définir la psychologie du martyr (shahid) islamique et du kamikaze dAl-Qaida ou du Hamas à qui le Coran promet le paradis d'Allah (9-111) ruisselant de miel et rempli de belles houris aux yeux noirs ?

12. « L'Ur-fasciste étend sa volonté de domination aux questions sexuelles. D'où le machisme qui implique à la fois le mépris de la femme, l'intolérance et la condamnation des habitudes sexuelles dérogeant de la normalité, depuis la chasteté jusqiià l'homosexualité. » C'est ainsi qu'en Malaisie, les autorités ont doté les couples, depuis janvier 1999, d'un système de carte à puce prouvant leur statut matrimonial, afin de lutter contre l'adultère... Scénario digne de 1984 de George Orwell. Nous avons vu aussi comment Ibn Taymiyya autorise l'assassinat des moines, ce que met en pratique le GIA, et comment, pour les islamistes, les femmes sont inférieures aux hommes et considérées comme véhicules privilégiés du diable.

13. Pour les Ur-fascistes, les individus en tant que tels n'ont pas de droits... » Le terme de « fascisme » a été utilisé pour la première fois pour définir l'Islamisme par l'Algérien Rachid Boudjedra qui, dans son essai pamphlétaire, Les FIS de la haine", voulut dénoncer l'idéologie réactionnaire et barbare « Ur-fasciste » du Front islamique du salut. Boudjedra explique comment l'Islamisme a peu a peu défiguré l'Algérie moderne aux termes d'une action subversive menée de longue haleine par des professeurs issus des rangs des Frères musulmans égyptiens. Pour lui l'Islamisme, dans sa version terroriste comme dans ses apparitions électoralistes plus respectables, est une idéologie antidémocratique, raciste, judéophobe, machiste, et foncièrement fascisante, l'intellectuel algérien comparant le FIS au parti nazi des années 1930, et ses complices aux nouveaux collaborateurs. Une fatwa sera lancée contre lui en 1983. Il est vrai que l'un des fondateurs du FIS et ancien cadre du FLN, Mohammed Saïd, commanditaire du fameux massacre de Belouza, fut un fervent nazi pendant la Seconde Guerre mondiale.

Les ressemblances entre l'Islamisme et le national-socialisme sont frappantes. Tout deux éprouvent la même haine absolue envers les démocraties, le libéralisme et les « ploutocraties ». En matière de barbarie, d'antisémitisme absolu, de légitimation de la violence, le totalitarisme islamiste emprunte incontestablement au nazisme ses références, à commencer par ses lectures, comme Mein Kampf, et surtout les Protocoles des Sages de Sion qui sont diffuses et cités par les islamistes, notamment sur des sites Internet (Moujahidéen.com, qoqaz.faire, radioislam.net, stcom.net, etc.). Citant les travaux de Manfred Halpern, l'Islamologue Montgomery Watt avait déjà mis en lumière les proximités idéologiques et psychologiques qui unissent le fanatisme islamiste et les idéologies fascisantes. Il n'hésita pas à présenter les Frères musulmans - ainsi que les mouvements comme Fida'iyan-i-Islam en Perse et Khaksars et Jamiat-i-islam au Pakistan - comme les manifestations d'un « totalitarisme néo-islamique qui montre leurs ressemblances avec le fascisme, y compris le national-socialisme d'Adolf Hitler. Il est vrai que ces mouvements se concentrent sur la mobilisation des passions et de la violence pour accroître le pouvoir de leurs leaders charismatiques et la solidarité du mouvement et qu'ils se font les champions des valeurs et des sentiments d'un passé héroïque, tout en réprimant toute analyse critique de leurs origines passées ou de leurs problèmes actuels" ». Autre analogie entre les mouvements islamistes et les fascismes, le culte du chef, le rôle central du guide (Führer, Duce, etc.), terme que l'on retrouve d'ailleurs chez les Frères musulmans à travers le « Guide suprême » de l'organisation, ou encore en Iran avec le « Guide suprême de la révolution » (Khomeyni).

VERT-BRUN-ROUGE, SIMILITUDES OU CONVERGENCES TOTALITAIRES ?

À maints égards, l'Islamisme est le digne successeur du nazisme. Les convergences sont proprement frappantes : même embrigadement de la jeunesse, même idéologie de guerre permanente et exterminatrice, mêmes méthodes de manipulation des foules, même complexe « d'humiliation », même mariage entre les élites scientifiques fanatisées et les marginaux désoeuvrés ou autres exclus du système, séduits puis recrutés, même culte de la mort, mêmes conceptions paranoïaques du monde et même judéophobie obsessionnelle. Les discours violemment antijuifs et antioccidentaux de la conférence de Durban retentissent comme un lointain écho recyclé de ceux de Nuremberg, a la différence près que le nouveau « peuple supérieur » est la oumma islamique du tiers-monde, tandis que les nouvelles « races inférieures » et méprisables sont les « Blancs-judéo-croisés ». Bref, le Sud islamisé contre le Nord mécréant. Il ne s'agit point là d'une énième récupération de la rhétorique antifasciste. Pétain et Hitler étaient très populaires dans le monde musulman. Le Coran était l'un des livres de chevet préférés de Himmler, tandis que l'ancêtre des fascismes, Édouard Drumont encensait des 1870 la résistance islamique à la « République maçonnique » qu'il vomissait.

L'histoire de la Seconde Guerre mondiale témoigne d'une réelle collaboration entre les précurseurs du totalitarisme vert et les forces de l'Axe. Ainsi, le grand mufti de Jérusalem de l'époque, AI-Hadj Husseini, l'une des références de l'Islamisme des Frères musulmans palestiniens, fut l'un des piliers de la mise en oeuvre de la solution finale dans les Balkans. Les fatwas d'Husseini justifièrent le djihad contre les juifs, les alliés, les Serbes et les communistes yougoslaves. C'est en effet le grand mufti qui présida aux destinées des divisions SS musulmanes, constituées dans les Balkans sous le dictateur croate pronazi Ante Pavelic : 13ème légion Waffen-SS Handschar, division SS Skandebeg en milieu albanais, division musulmane SS Kama, milices de Nasid Topcic et Hajji Effendic appelés Cadres verts en Bosnie orientale, Légion islamique d'Huska Milikovic, etc. « La seule voie pour la jeunesse musulmane est celle d'Hitler et de Pavelic », expliquait en 1943 l'un des plus grands chefs religieux musulman de Bosnie, Muhammad Pacha". En novembre 1944, al Husseini annonça avec enthousiasme au micro de Radio-Berlin la création d'une autre entité combattante, la Légion arabe, destinée à permettre la poursuite de la guerre contre les juifs installés en Palestine aux cotés de l'Axe. Parallèlement, le grand mufti s'assurait du soutien d'autres grands responsables pronazis en terre d'islam, de l'Égypte, avec les « chemises vertes » de Mustapha al-Ouakil, alias Kurt Hoffman, à la Tunisie, en passant par le Caucase, notamment avec Ali Khan, le « Pétain du Caucase du Nord », la Pologne, avec le mufti Szymkowicz, et les territoires soviétiques encore occupés, avec Mohammed el-Gazani, chef de file des musulmans antisoviétiques pronazis, Mikhaïl Dudanginsky, bientOt chef de la Légion SS azerbaïdjanaise, sans oublier les volontaires pronazis tchétchènes, ou encore l'Obersturmfürher Olzcha, lequel rêvait de créer une légion pronazie antibolchevique composée de volontaires turco-tatares.

Si le grand mufti de Jérusalem se fit national-socialiste, la réciproque s'est également vérifiée : deux protagonistes d'envergure du nazisme embrasseront l'Islam pour les mêmes raisons qu'Husseini le nazisme : la haine des juifs. Il s'agit d'abord du Suisse François Genoud, le célèbre banquier du nazisme et héritier testamentaire d'Hitler et de Goebbels, devenu le financier des terroristes palestiniens et du FLN algérien avant d'embrasser lui aussi l'Islam et de rejoindre les options islamistes, se liant d'amitié, à Genève, avec le pionnier des Frères musulmans en Europe et propre gendre d'Hassan al-Banna, Saïd Ramadan. N'oublions pas que, dans les camps palestiniens du Liban (TO al-Zaatar, Bir Hassan), FOU n'hésitera pas à recruter des militants néonazis allemands comme par exemple ceux du groupe Wehrsportsgruppe (groupe sportif militaire) de Karl-Heinz Hoffman. Après la conférence pronazie de Barcelone organisée par Léon Degrelle en avril 1969, des instructeurs militaires nazis comme Erich Altern, alias Ali Bella, ancien dirigeant régional des Affaires juives de la Gestapo pour la région de la Galicie, furent chargés d'aller former les Palestiniens au Proche-Orient. Des camps d'entraînement palestiniens furent organisés par cette internationale néonazie proarabe dans les Pyrénées espagnoles et dans le Haut-Adige italien où le camp de Malta Croun, destiné à « forger la jeunesse palestinienne », fut confié au groupe fasciste Avanguardia nazionale. Ainsi, aux côtés des nazis et des terroristes d'extrême gauche propalestiniens (Action directe, Brigades rouges, bande à Baader, Fraction armée rouge japonaise, groupe Carlos, etc.), marqués par un antisémitisme marxiste, la nébuleuse révolutionnaire propalestinienne rouge-brun-vert sera l'un des plus efficaces vecteurs de la judéophobie moderne, le biais islamo-arabe exotique redonnant une virginite a une idéologie qui semblait avoir été définitivement vaincue en 1945. En 1935, déjà, lors d'un voyage en Iran en compagnie de Jean Bauverd, le très islamophile chef du pronazi Front national suisse Genoud expliquait : « Elran est une nation musulmane et l'Islam, au contraire de la chrétienté, a toujours été imperméable aux influences dissolvantes et matérialistes . »

Continuons avec le dignitaire nazi Johannes von Leers, ancien adjoint de Goebbels, responsable de la propagande antijuive sous Nasser. Devenu musulman sous le nom d'Omar Amine, von Leers reste jusqu'aujourd'hui, avec Genoud et le grand mufti, l'une des références absolues de nombreux militants d'extreme droite convertis à l'Islam, dont certains ont emprunté le nom d'Omar Amine, notamment Claudio Mutti en Italie, idéologue néofasciste et éditeur des Protocoles des Sages de Sion. C'est von Leers qui inspira, dans les années 1950, les premiers révisionnistes. On peut citer également l'ex-journaliste socialiste Ahmad (Albert) Huber, devenu luilsulman dans les années 1960 dans le cadre de la lutte en faveur de l'Algérie indépendante et de l'Égypte nassérienne où il s'emballa Pour la cause révisionniste et néonazie après avoir rencontré au Caire, en 1962, Johannes von Leers et le grand mufti, avant de se ranger du côté de l'ayatollah Khomeyni dès 1979. Huber appelle aujourd'hui à voter en faveur du Front national de Jean-Marie Le Pen.

En Turquie, l'alliance entre le croissant et la croix gammée se lestera autour de la nébuleuse ultranationaliste panturquiste des Loups gris dont le chef, Alparslan Türkes, sera arrêté en 1944 pour activités pronazies. Laïque au départ, le mouvement des Loups gris évolua progressivement vers l'Islamisme, comme en a témoigné le terroriste Ali Agça, un de leurs membres actifs, qui tenta d'assassiner le pape Jean-Paul Il en mai 1983, obéissant ainsi au devoir de « tuer le chef de la nouvelle croisade chrétienne contre l'Islam ». Aujourd'hui encore, c'est en mémoire de la geste islamonazie du grand mufti de Jérusalem ou des rencontres entre Khomeyni et des officiers SS durant la Seconde Guerre mondiale - les Iraniens étant considérés comme des « frères aryens » par nombre de nazis - que de nombreux groupes néonazis européens ou américains saluent la geste antijuive du Hezbollah ou du Hamas, la force guerrière de Ben Laden ou de la révolution khomeyniste. Au sein de la « nouvelle droite », on salue même le fait que l'Islam est une « religion virile ». On oublie trop souvent que l'Islamisme et le nazisme - qui se réfère au paganisme germain - communient dans une même détestation de l'héritage judéo-chrétien de l'Occident. Ceci explique les étranges accointances unissant aujourd'hui encore les islamistes et les représentants d'une certaine extrême droite néopaïenne tout aussi radicalement antichrétienne qu'antijuive, appelant de ses voeux, comme les islamistes, la destruction des sociétés judéo-maçonniques et chrétiennes :

« Europe et Islam ont en commun l'ennemi principal, la finance usurocratique. Si elle veut retrouver son autonomie, l'Europe doit chercher son inspiration et son guide dans la Loi divine, telle que conservée dans le livre d'Allah », écrit Claudio Mutti", admirateur de la Garde de fer et de l'Axe. « Le jour prochain où les islamistes prendront le pouvoir, ils deviendront le vecteur universel de résistance à la mondialisation occidentalo-américaine. Et tous les hommes enracinés spirituellement et culturellement devront alors s'y associer », poursuit Arnaud Guyot-Jeannin", l'une des figures de la « nouvelle droite » française. « La Nouvelle Droite (ND) approuve le ressourcement culturel et spirituel de tous les peuples. Elle appelle la civilisation européenne à se replonger dans ses plus anciennes racines (dont elle a été éloignée non pas par l'Islamisation mais par la christianisation, les Européens et les Arabes partagent la même Mare Nostrum », précise un autre représentant de cette mouvance, Georges Feltin-Tracol", admirateur de Hassan al-Tourabbi. « Nous assistons à la progression constante de la seule force capable de résister à l'hégémonie occidentaliste : l'Islamisme radical. Deux visions du monde (Weltanschaung) s'affrontent. D'un côté, une vision libérale-consumériste. De l'autre, une vision religieuse, identitaire et holiste : l'Islam, récapitulation définitive de la tradition primordiale.

C'est donc a un véritable djihad qu'Européens et musulmans sont convies. Europe-Islam, même combat », affirme le gunonien Arnaud Galtieri". « Nos ennemis sont la coalition américano-sioniste. Il est donc juste que nous soutenions ceux qui ont les mêmes ennemis que nous, c'est-à-dire les Palestiniens, les gouvernements libyen, irakien. Les islamistes représentent une force multiforme qui peut être une alliée contre l'impérialisme américano-sioniste », écrit Christian Bouchet", dirigeant du mouvement d'extrême droite prolibyen et pro-iranien "Jeune Résistance" et rédacteur en chef de Lutte du peuple, qui exprime sa solidarité avec les martyrs du Illème Reich, du Djihad islamique et du Hamas sur le site internet du groupuscule « national-révolutionnaire » Unité radicale (proche du GUD) qu'il anime. En Suède, enfin, l'alliance de la croix gammée et du croissant est incarnée par l'organisation de l'opposant islamiste marocain Ahmed Rami, à l'origine d'une synthèse « islamo-néonazie-revisionniste » dont le principal vecteur est le site internet radio islam et dont les contacts officieux en France sont les milieux révisionnistes (Librairie roumaine antitotalitaire, Vieille Taupe de Pierre Guillaume, revue Faits et Documents et site internet d'Emmanuel Ratier) et les sites Internet Nationalbolchevik et AAARGH (Associadon des anciens amateurs de récits de guerre et d'holocauste). Le révisionniste Serge Thion y fait notamment l'éloge du groupe terroriste Djihad islamique ; Faurisson y tient des tribunes aux côtes de Rami. Mieux, Ahmed Rami et son porte-parole Kamal Khan appellent régulièrement à voter pour le Front national en affirmant que Le Pen et sa femme seraient les « vrais amis » des Arabes et de l'Irak, le Front national le seul parti réellement « antisioniste ». En fait, les disciples et nostalgiques d'Hitler dont jamais fait que suivre les indications du maître suprême, qui déclare dans son Testament préfacé par François Genoud : « Tout l'Islam vibrait à l'annonce de nos victoires. Les Égyptiens, les Irakiens et le Proche-Orient tout entiers prêts à se soulever. Que pouvions-nous faire pour les aider


Mis à jour le 5/12/2014 pratclif.com