MUZAFFARABAD (AFP)

L'aide arrive enfin en Asie du Sud, peut-être 40.000 morts
L'aide commençait enfin à atteindre mardi les millions de sans-abri dans le nord du Pakistan, plus de trois jours après le séisme qui pourrait avoir fait 40.000 morts et plus de 60.000 blessés en Asie du Sud, selon les estimations des autorités.
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Le Premier ministre pakistanais Shaukat Aziz a fait état mardi d'un bilan provisoire pour son seul pays de quelque 23.000 morts et 51.000 blessés, ainsi que de 2,5 millions de sans-abri. "Ces chiffres devraient encore augmenter", à mesure que les rapports provenant de villages de montagne reculés parviennent aux autorités, a averti le Premier ministre.

L'énorme majorité des morts (17.000) a été enregistrée au Cachemire sous administration pakistanaise et notamment à Muzaffarabad (11.000 morts), la capitale de cette province, située à quelques kilomètres au sud de l'épicentre du séisme. Des hélicoptères militaires américains sont arrivés mardi à Muzaffarabad. Et grâce à la réouverture des routes, des dizaines de camions de l'armée pakistanaise ont commencé également à parvenir dans cette ville de plus de 125.000 habitants, aux trois quarts détruite par la secousse de 7,6 sur l'échelle de Richter. Dans la ville ravagée, des habitants armés au mieux de pelles et de barres de fer s'efforçaient encore de retrouver des proches dans les décombres. "J'essaie de retrouver ma mère et mes deux frères depuis samedi. On n'a eu aucune aide, je suis sûr qu'ils sont morts maintenant", se lamentait Naeem Abbasi, dont le magasin s'est effondré samedi.

A Islamabad, deux femmes miraculées dont des sauveteurs britanniques avaient détecté les faibles murmures ont été sorties vivantes mardi des décombres d'une tour d'habitation de dix étages, la Margalla Tower, seul immeuble important à s'être effondré dans la ville. La femme de 45 ans et sa mère ont été secourues mardi après-midi, 80 heures après le tremblement de terre. "Elles n'ont pas subi de blessures graves et leurs vies ne se trouvent pas en danger", a déclaré le dr Azkar Beg qui a participé aux secours. Une Irakienne et son fils de deux ans avaient été secourus lundi après avoir passé soixante heures sous les décombres de la Margalla Tower.

Depuis samedi, huit personnes ont été extraites vivantes des décombres à Muzaffarabad, et dans la ville de Balakot également dévastée, cinq enfants ont été sauvés au cours des dernières vingt quatre heures par des secouristes français. Par ailleurs, le séisme aurait durement touché les rebelles islamistes très implantés dans la zone sinistrée et au moins soixante-dix moudjahidine ont trouvé la mort, selon le responsable d'un parti islamiste pakistanais. Tous les bureaux, écoles (madrassas) et mosquées affiliés au Jamaat-ud-Dawa ont été détruits. "Il ne reste rien", a indiqué le mollah Abdul Aziz Alvi, un des responsables de ce parti, appelant à passer à "un djihad (guerre sainte) différent en aidant les gens en détresse".

A part quelques dons acheminés à bord de camions par des organisations non gouvernementales (ONG) locales et les autorités, aucune grande distribution de nourriture n'avait encore eu lieu mardi dans la ville, où de nouvelles bagarres ont éclaté dans la journée lorsque la police a distribué des biscuits, du lait et des couvertures en nombre limité.

Peu après l'arrivée des premiers secours, des orages et des pluies torrentielles ont suspendu les opérations pendant deux heures. "Des dizaines d'hélicoptères ont été immobilisés sur la base militaire de Chaklala", a déclaré à l'AFP un officier de la base en indiquant que les vols avaient repris peu avant 17h00 (12h00 GMT). Selon les services de météorologie, de fortes précipitations étaient prévues dans toute la région du Cachemire et sur le nord du pays.

Médecins sans Frontières (MSF) a mis en garde mardi contre les risques d'épidémies à Muzaffarabad en raison d'une possible "contamination" de l'eau par les nombreux cadavres. L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a également mis en garde contre l'apparition de maladies diarrhéiques, ainsi qu'une éventuelle flambée épidémique de rougeole, mortelle pour les enfants en bas âge. Selon l'Onu, un millier d'hôpitaux ont été "complètement détruits" au Pakistan, et "de nombreux membres du personnel de santé, notamment des médecins et des infirmiers, ont péri ou été grièvement blessés", a précisé l'OMS. Pour l'Unicef, "les enfants vont être les principales victimes de cette catastrophe (car) une personne sur cinq dans cette région a moins de cinq ans". Une quinzaine d'écoles ont été détruites à Muzaffarabad.

Le Cachemire indien déplore pour sa part 1.300 morts et plus de 32.000 habitations endommagées, a annoncé le Premier ministre Manmohan Singh au cours d'un déplacement dans la région dévastée. Beaucoup de victimes n'ont pas encore vu arriver le moindre secours, en particulier dans les villages de montagne des contreforts de l'Himalaya.

Face à l'ampleur de la catastrophe, pour laquelle les Nations unies ont annoncé mardi le lancement d'un appel de fonds portant sur 272 millions de dollars sur une période de six mois, de nombreux pays et organisation ont proposé leur aide. L'Otan se préparait mardi à prêter assistance au Pakistan, après avoir reçu la veille une demande formelle d'aide des autorités d'Islamabad portant sur l'envoi de moyens aériens, notamment des hélicoptères, d'équipements divers et de vivres.

L'Allemagne a annoncé avoir renforcé son aide en versant à la Croix-Rouge allemande (DRK) 300.000 euros pour la fourniture d'un hôpital de campagne au Cachemire. Quant au dirigeant cubain Fidel Castro, il a proposé à son homologue pakistanais, le général Pervez Musharraf, de lui envoyer 200 médecins, selon la presse officielle cubaine.