Chapitre VII :
Il existe des marges d'action susceptibles
d'assurer l'avenir des retraites

 

Comme on vient de le voir dans les chapitres précédents, quel que soit le scénario macro-économique retenu, les marges de manœuvre financières dégagées par la baisse du chômage ne sont pas suffisantes pour compenser les charges de retraite supplémentaires induites par l'allongement de l'espérance de vie et l'arrivée à la retraite des générations nombreuses d'après-guerre.

Même dans la variante à 3 % de chômage et réduction de 9 mois de l'âge de début d'activité (ce qui correspond à 1,2 million d'emplois supplémentaires par rapport au scénario initial à 6 % de chômage et augmentation de la population active de 500 000 personnes(1)), les régimes de retraite connaîtraient à long terme des difficultés financières. Si l'on retenait une évolution de l'ensemble des pensions de retraite parallèle à celle des salaires, la charge vieillesse représenterait en effet dans cette variante chômage à 3 %, 17,8 points de PIB en 2040 contre 12,1 points actuellement.

(1) Les 500.000 emplois correspondent au nombre actuel de préretraités et de chômeurs âgés.

Face à cette situation, le catastrophisme - avec l'annonce de la faillite certaine à long terme du système de retraites par répartition - n'est toutefois pas de mise.

Des marges d'action existent, si l'on sait les mobiliser, pour assurer à long terme la viabilité du système et garantir ses objectifs initiaux de solidarité. Le système de retraite français est un élément essentiel de la cohésion sociale. Fondé sur la solidarité, il opère de larges redistributions garantissant à chaque Français un niveau de vie satisfaisant. Il a permis de réduire considérablement la pauvreté chez les personnes âgées. On ne saurait dès lors laisser le système dériver et aller à long terme à son éclatement. Le préserver et le consolider sont des objectifs majeurs que l'on doit s'assigner.

Le problème du financement des retraites est en fait un problème d'arbitrage entre taux de prélèvement sur les actifs, âge de la retraite et niveau de vie relatif des retraités. La hausse du taux de prélèvement dépend tout autant de l'évolution du ratio nombre de retraités/nombre d'actifs que de celle des niveaux de vie relatifs (chapitre III).

Quel que soit l'arbitrage retenu, la croissance de la productivité permet de financer des pensions de retraite plus élevées qu'elles ne le sont aujourd'hui, et ce pendant plus longtemps. En aucun cas il n'y aura de paupérisation à long terme des retraites des systèmes publics par répartition. La question qui est posée est en fait celle du niveau de vie relatif entre actifs et retraités et non celle du niveau de vie absolu des retraités. Sous les hypothèses macro-économiques retenues pour établir les projections, les salaires doubleraient en 40 ans. Or la dégradation prévisible du taux de dépendance ne permet pas d'assurer l'équilibre à long terme du système de retraite - à âge de départ à la retraite inchangé - sans augmentation importante du taux de prélèvement ou baisse relative du niveau des pensions. Pour éviter ces deux écueils, un paramètre essentiel d'ajustement est l'âge de départ à la retraite.

Pour assurer la viabilité à long terme de nos régimes de retraite, et permettre qu'ils répondent à leur objectif initial de solidarité, plusieurs pistes de réforme peuvent être envisagées.

La première piste de réforme étudiée prend acte de l'allongement de l'espérance de vie ainsi que de l'amélioration générale de l'état de santé au-delà de 60 ans. Elle consiste à allonger progressivement - d'un trimestre par génération - la durée d'assurance nécessaire pour avoir le taux plein, pour atteindre, au terme de la réforme, en 2019, 170 trimestres.

D'autres pistes de réforme ont aussi été analysées : la constitution de réserves permettant d'amortir les conséquences du changement de régime démographique, l'élargissement de l'assiette des cotisations à d'autres revenus, l'aménagement de certains dispositifs afin de favoriser la cohésion sociale (modalités actuelles d'indexation des pensions des régimes du secteur privé, financement et contour des différents avantages familiaux, validations de certaines périodes d'activité ou d'inactivité, prise en compte de la pénibilité du travail).

Ces différents éléments ne forment pas toutefois un projet de réforme. Le diagnostic établi montre qu'une réforme globale du système de retraite est nécessaire. Ceci suppose des concertations plus décentralisées régime par régime pour tenir compte des spécificités propres à chaque régime. Cela suppose aussi que l'on prévoie un dispositif de pilotage des futures réformes.