Dénatalité : Le péril vieux

Des chocs démographiques en cascade
Nicholas Timmins; Financial Times juillet 2005

Les pays développés commencent à mesurer le défi politique et économique que représente le vieillissement de leur population. Mais ce n’est rien à côté de ce qui s’annonce dans le monde en développement, notamment en Chine.

Il y a une vingtaine d’années, la démographie était le pré carré des universitaires et de ceux qui s’inquiétaient de la surpopulation du globe. Aujourd’hui, elle est devenue une préoccupation pour les responsables politiques à peu près partout dans le monde. Comme l’écrivait le Fonds monétaire international, en septembre 2004, dans son rapport sur les perspectives économiques mondiales : “Démographiquement, le monde traverse une importante phase de transition. […] Non seulement la croissance démographique se ralentit, mais la structure par âges de la population évolue – la part des jeunes diminue et celle des personnes âgées augmente.”

Dans tous les pays développés, ce phénomène soulève bien des interrogations quant aux systèmes de retraite et à la manière dont on pourra subvenir aux besoins, en termes de revenus mais aussi de santé, d’une population âgée grandissante.

Le rapport actifs-retraités va s’effondrer dans l’ensemble du monde développé, quoique de façon plus spectaculaire dans certains pays que dans d’autres. L’Europe et le Japon vieillissent plus vite que les Etats-Unis, où les taux de fécondité et d’immigration sont plus élevés. De fait, les résultats du recensement de l’an 2000 laissent à penser que les Etats-Unis pourraient finir par constituer une exception démographique dans le monde développé. A terme, ils pourraient même redevenir un pays jeune, à la population en hausse.

La Chine va connaître un vieillissement accéléré

Mais, si l’Europe, le Japon et les Etats-Unis, et bientôt l’Amérique latine, traversent une phase de transition démographique, ce n’est rien en comparaison de celle qui s’annonce dans certains pays en voie de développement, où la transition sera beaucoup plus rapide, voire à peine gérable.

Les taux de fécondité demeurent élevés en Afrique et au Moyen-Orient. Mais, selon l’Organisation des Nations unies, ils sont déjà inférieurs au taux de remplacement en Asie de l’Est. Si le rapport actifs-retraités diminue dans les pays développés et risque de passer d’environ quatre actifs pour un retraité à un peu plus de deux, la situation de la Chine est bien plus catastrophique. Ce pays va en effet connaître un vieillissement accéléré. A cause de sa politique de l’enfant unique, le rapport entre la population active et les personnes de plus de 65 ans devrait, selon les projections, chuter de matière vertigineuse : il passerait de plus de six pour un en 2000 à moins de deux pour un en 2050, du jamais-vu.

Le vieillissement de la population va également s’accélérer dans d’autres régions d’Asie. La plupart de ces pays ne disposent pas d’un système de protection sociale comme il en existe dans le monde développé. Certes, ce dernier va devoir adapter son système de couverture sociale à la nouvelle donne démographique, mais celui-ci a au moins le mérite d’exister.

Ces changements spectaculaires permettront de réduire la croissance démographique mondiale. Mais, d’un autre côté, ils représentent une gageure en matière de retraites et de santé publique. Notre planète s’adaptera. Pourtant, cette adaptation sera loin d’être facile, et les conséquences de ces bouleversements démographiques risquent d’occuper les hommes d’affaires et la classe politique pour bien des années.