22 mai 1940 Lillers et Artois-Lys
Le village sous les bombes

Le village a été éventré par les bombes et les torpilles (ici, l'église). Le village a été éventré par les bombes et les torpilles (ici, l'église).

Ce jour-là, bombes et torpilles s'abattent sur Saint-Venant. Treize civils meurent sous l'assaut allemand, beaucoup d'autres décident de fuir en abandonnant le village.

L'association de recherches historiques et archéologiques militaires présentera du 22 au 27 mai une exposition sur l'histoire du Corps expéditionnaire britannique dans les années 1939-1934, dans le cadre de la commémoration du 70ème anniversaire des événements de mai 1940.

À cette occasion, Dominique Faivre, président de l'association présentera une nouvelle édition de son ouvrage sur les combats de 1940 dans la région de Saint-Venant. Il nous aide à replonger dans les souvenirs de la cité.

« Après la drôle de guerre (de septembre 1939 à mai 1940), la guerre éclaire va surprendre tout le monde. Le 10 mai, les Allemands lancent une attaque fulgurante sur la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg. Quelques jours plus tard, c'est la percée des Ardennes. Le piège se referme. Les alliés sont peu à peu pris en tenaille. Nos régions sont désormais au coeur de la tourmente.

Le drame touche d'abord les civils qui sont jetés sur les routes. Nos villes et villages d'Artois et du pays de la Lys accueillent à partir du 15 mai un flot ininterrompu de réfugiés hagards et désespérés. La guerre est à notre porte. C'est le 22 mai 1940 que le cauchemar commence pour Saint Venant.

Saint-Venant sous les bombes Ce n'est plus une rumeur, c'est maintenant sûr, les Allemands arriveront dans quelques jours... par l'ouest. Les réfugiés sont formels, certains ont du même faire demi-tour. La question qui se pose alors pour les habitants de Saint-Venant est pressante : « Faut-il ou non quitter notre maison ?

» L'inquiétude grandit. La gare d'Aire a été bombardée dans l'après midi, les voies sont détruites.

Les premiers ronronnements des moteurs se font entendre vers 19h. Ce sont des avions qui passent à basse altitude. Ils arrivent de Robecq. Soudain, le hululement des sirènes retentit. La première torpille tombe dans la rue de la gare. « Abritez-vous, ce sont les Boches », crie un soldat français. « Tous dans les caves ! ». Les bombes et les torpilles pleuvent sur la ville.

Le fracas des explosions et des immeubles qui s'effondrent est épouvantable. Les gens affolés s'enfuient et se cachent où ils le peuvent. La place et les rues sont d'un seul coup devenues désertes.

Tous n'ont pas eu la chance de s'en sortir... Citons le cas de monsieur Desprez qui était allé à l'église pour se confesser, il est touché par des éclats et s'affale grièvement blessé sur les pavés. Il sera ramassé quelques minutes plus tard par une personne de passage qui l'emportera sur son dos jusqu'à l'hôpital où il décède le lendemain.

On se souvient aussi de l'histoire de cette famille de réfugiés lilloise, rue des casernes. La famille se précipite à l'abri dans des dépendances de la brasserie Vanhoucke dès l'attaque des « stukas ». Elle pense être en sécurité derrière ces murs épais. Mais une bombe explose sur le bâtiment. la famille Rouffelaers est décimée : la mère et trois de ses enfants sont tués sur le coup, les trois autres sont grièvement blessés. On retrouvera huit autres corps sans vie de femmes et d'enfants.

Dans la ville naît un élan de solidarité. Les dégâts sont considérables, les maisons qui n'ont pas été touchées directement par les bombes ou les torpilles ont leurs fenêtres soufflées, leurs portes éventrées. Les pompiers s'affairent pour combattre l'incendie sur la place. Les canalisations d'eau sont abîmées.

Les fils électriques sont arrachés et pendent sur le sol. La vie est devenue impossible dans le centre surtout que certains pans de murs d'immeubles risquent de s'écrouler.

Il faut fuir, coûte que coûte Ce premier contact des Saint-Venantais avec la guerre est meurtrier. Treize civils sont morts, de nombreux autres sont blessés.

Les plus touchés sont orientés vers l'hôpital psychiatrique pour y recevoir des soins. D'autres sont conduits à l'asile-hospice tout proche, afin d'être soignés par les religieuses.

Le moment de stupéfaction passé, la peur gagne l'ensemble de la population et une question se pose : ces avions semant la mort et la désolation sur leur passage, vont-ils revenir ?

Devant cette incertitude, beaucoup décident de quitter leur foyer le soir même.

Toute la nuit et pendant plusieurs jours les différents incendies vont éclairer la ville d'une lumière diabolique en prémonition de l'enfer que va vivre Saint-Venant dans les jours à venir.

À partir de ce jour, la guerre est installée dans la région. Les habitants qui ont décidé de rester vont vivre dans les combats des moments tragiques.

Franck HANNEBICQ
Extraits tirés de l'ouvrage de Dominique Faivre, "Les combats de 1940 dans la région de Saint Venant" [lien].


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Mis en ligne le 28/01/2013