La crise n'en finit pas (suite)

Comment se constituent la dette de l'État, des ménages et des entreprises privées.

L'État assure les services publiques à la population: santé, éducation, sécurité, fonctionnement des services administratifs, des armées, des infrastructures publiques, etc. L'État investit aussi pour l'avenir, en éducation, santé, infrastructures. Les dépenses correspondant à ces services et investissements sont couverts par la fiscalité cad. les impôts et des emprunts. Les engagements de l'État sont payés par le Trésor Publique. Un déficit apparaît quand les recettes sont inférieures aux dépenses ce qui requiert d'emprunter ou d'imprimer de la monnaie fiduciaire. En pratique, le déficit est impossible car l'État doit impérativement règler tous les paiements correspondant à ses engagements, sinon des personnels ne sont pas payés, ou des entreprises fournisseurs de biens intermédiaires, électricité, eau, ou des entreprises engagées pour réaliser des projets.

Avant 1973, l'État cad. le Trésor Public, présentait les effets de paiement des dépenses qui n'étaient plus couvertes par les impôts - à la banque de France. La Banque de France émettait de la monnaie par la "planche à billets", ce qui était jusqu'alors le droit souverain de tout État. Cette monnaie créée était immédiatement injectée dans l'économie puisque c'était pour payer les engagements de l'État. En 1973, une loi interdit à l’État de présenter ses effets à la Banque de France :Loi n°73-7 du 3 janvier 1973 sur la Banque de France. La justification du principal promoteur de cette loi (Valéry Giscard d’Estaing, alors ministre des finances de Georges Pompidou président de la République, ex Directeur Général de la Banque Rotschild) fut d'empêcher l’État d’utiliser la "planche à billets" et par voie de conséquence de limiter l’inflation. Mais l’inflation fut très largement supérieure dans la décénnie qui suivit 1973-1982, par rapport à la décennie précédante 1962 - 1972: 11.2% en moyenne au lieu de 4.4%. A partir de 1973, l'État dut recourir à l'emprunt par les bons du trésor ou des emprunts d'État pour couvrir les déficits nés de dépenses publiques supérieures aux recettes fiscales. Un emprunt d'État sera justement lancé après la création de cette loi. En 1973, Valéry Giscard d'Estaing met en place "l'Emprunt Giscard", emprunt national à un taux d'intérêt de 7% qui sera particulièrement coûteux pour la France puisque pour 7.5 milliards de francs empruntés pour 15 ans, l'État dut rembourser (en intérêts et capital) plus de 90 milliards de francs.

Aujourd'hui, près de 40 ans après la loi de 1973 sur la Banque de France, reprise par le traité de Maastricht et le traité de Lisbonne, la dette de l'État est constituée par l'accumulation des déficits annuels - recettes moins dépenses - et par le cumul des intérêts du service de la dette. La dette cumulée fin 2010 (en € courants) était de 1380 milliards d'€ (82.3% du PIB); le paiement des intérêts aux investisseurs privés - banques - était de 43 milliards au budget de 2010 (lien).

Il convient de ramener tous les chiffres depuis 1979 en monnaie constante, disons de 2010. C'est ce qu'a fait André Jacques Holbecq (lien); le déficit est alors de 1591 milliards d'€ et les intérêts cumulés depuis 1979 sont de 1408 milliards d'€ (lien). Sans les intérêts, la dette serait de 1591-1408=183 milliards d'€ donc quasiment insignifiante (#10% du PIB).

Comment les investisseurs acquièrent des bons d'État?

Les ménages acquièrent de tels bons en principe par le débit de leurs comptes; mais certains peuvent obtenir des prêts bancaires. Les investisseurs institutionnels investissent leurs propres fonds (surplus) et certains, y compris les banques elles-mêmes obtiennent les fonds par crédits bancaires. Dans ce cas ces institutions jouent avec les cours des bons d'États qui fluctuent avec les taux d'intérêts. Voir ici une analyse de Natixis, "Qui détient la dette de qui?".

Reste à évoquer dette publique et dette privée (lien). On a vu ce qu'était la dette publique, ou dette souveraine des États. Qu'est ce que la dette privée; qui la détient? C'est la dette des ménages, des entreprises et des institutions financières les banques. La dette des ménages est la somme de leurs engagements pour achats de logement, de voitures, d'équipements électro-ménagers et autres; la dette des entreprises correspond à leurs achats d'équipements et investissements; la dette des institutions financières est la somme des assurances vie... La dette privée ménages et entreprises est estimée à près de 200% du PIB tandis que celle de l'État est de 85% du PIB en juin 2011.

Mis en ligne le 26/07/2011