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Planète à vendre
documentaire d'Alexis Marant

Réalisé par Alexis Marant, qui n’est pas le premier venu puisqu’il a obtenu le très prestigieux Prix Albert Londres en 2006, le documentaire diffusé par Ante le 19 avril 2011 - voir le documentaire intégral en premier lien à gauche - m'incite à réfléchir sur l'achat de terres agricoles dans le monde, l'agriculture, comment nourrir 9 milliards d'humains en 2050 et la relation entre l'économique et le social dans les sociétés humaines. Ce document me paraît équilibré; il n'est pas à charge.

J'ai regardé ce documentaire avec beaucoup d'intérêt que je souhaite partager. J'ai déjà publié de nombreux billets sur l'agriculture, le défi de nourrir 9 milliards d'habitants en 2050, la relation avec la démographie, les achats et locations de terres cultivables dans le monde. C'est pourquoi j'ai visionné ce documentaire avec des connaissances préalables que je pointe dans les liens de gauche. Je me bornerai donc à donner des réactions sur quelques aspects du documentaire d'Alexis Ma rant.

  1. L'Arabie Saoudite a développé une agriculture en cercles (Sud Est de Riad), irrigués par une nappe aquifère fossile, non renouvelable vu le climat actuel du pays (photo satellite). Le roi a décidé d'arrêter cette exploitation d'ici 2014 et a lancé une action pour acquérir des terres en Afrique de l'Est et y produire la nourriture pour son peuple. Pour assurer sa sécurité alimentaire, le roi Abdallah a choisi de délocaliser la production de nourriture, créant une entité publique dotée de 5,3 milliards de dollars pour prêter à taux préférentiels aux entrepreneurs saoudiens qui souhaitent investir dans des pays à fort potentiel agricole. Cette action évoque les excédents commerciaux importants de l'Arabie Saoudite dus à la production de pétrole, la pauvreté de l'Ethiopie et la volonté de son élite politique à couvrir ses importations par des exportations, développer le pays par des investissements directs étrangers apports de technologie, de financements, de savoir faire, etc. Tout cela pouvant être considéré comme positif pour le bien-être de la population locale.
  2. L'homme d'affaires indien Ram Karuturi de Bangalore a développé en Ethiopie une ferme de production de roses coupées sous serres irriguées capable de produire 1.5 million de roses par jour pour les marchés des pays européens; sans doute que les roses vendues dans nos grandes surfaces en toute saison proviennent de là. Ram Karuturi a acquis 300000 hectares de terres où il dit vouloir produire 3 millions de tonnes de riz par an (la production mondiale de riz était de 25 millions de tonnes en 2009). Il vendra le riz sur les marché asiatiques.
  3. Il faut lire l'article "Ethiopie: l’heure de la moisson a sonné" (lien) pour apprécier toute la problématique.
  4. Pergam Finances achète des terres cultivables en Argentine et en Uruguay pour y produire du soja transgénique destiné aux marchés des pays développés pour l'alimentation du bétail. Pour les investisseurs de la première heure, la plus value latente est supérieure à 40 %...

Je pense que nous sommes en présence d'une forme d'homogénéisation de la planète. Ce sont les populations locales qui vivent à leur façon depuis des décennies et selon leurs caractéristiques anthropologiques millénaires, qui ont le plus de mal à s'adapter aux nouvelles donnes: les paysans qui se nourrissent de leur terre avec des méthodes de production archaïques et de très faible productivité, qui élèvent leur bétail comme au débuts de la révolution agricole il y a 8000 ans. Les autorités doivent prendre toutes les dispositions pour permettre à leurs populations de s'adapter et faire en sorte que les investissements étrangers profitent aux populations locales autant qu'à leurs promoteurs. Les salariés qui travaillent dans ces entreprises à capitaux étrangers doivent recevoir des salaires qui leur permettent d'acquérir leur juste part de la richesse créée avec leur contribution. C'est dans ce sens que s'inscrit l'action d'Olivier de Schutter rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l'alimentation.


Mis en ligne le 08/12/2010