Les banques centrales peuvent-elles sauver la croissance ?

Alernatives économiques mars 2008: Wojtek Kalinowski

La nouvelle baisse du taux d'intérêt américain (désormais ramené de 5,25% à 2,25% en six mois) s'inscrit dans une politique poursuivie par la Fed depuis l'été dernier : relancer la croissance en rendant les crédits moins chers. Mais pour répondre au défi de la mondialisation financière, il faudra renouveler les instruments et les objectifs mêmes de la politique monétaire.

Si la Bourse américaine a rebondi à l'annonce de la nouvelle baisse de taux de la Fed, le doute demeure quant aux effets à moyen et long terme de cette politique. D'après Hector Lopin (« De nouveaux objectifs pour les banques centrales », Alternatives Economiques, hors-série n° 75, décembre 2007), nous avons besoin d'« une troisième génération de banquiers centraux, qui adapterait la politique monétaire à la nouvelle donne économique et financière de ce début de XXIe siècle. Le "logiciel" actuel des banques centrales est périmé : il a été défini dans les années 70-80, dans le contexte d'un régime de haute inflation. » En mettant en concurrence les salariés et les entreprises de différents pays, la mondialisation exerce désormais une pression permanente sur les prix et les salaires ; d'où la faiblesse de l'inflation depuis les années 90. Malgré une récente poussée, rappelle Sandra Moatti (« L'inflation est-elle de retour ? », Alternatives Economiques, hors-série n° 76, février 2008), l'inflation reste très timide par rapport aux niveaux enregistrés dans les années 80 et se concentre pour l'instant à quelques secteurs de l'économie.

Dans ce contexte nouveau, affirme Hector Lopin, il est urgent que les banquiers centraux « associent l'objectif de stabilité financière à celui de la stabilité monétaire » et « réagissent à l'évolution des prix des actifs (actions, immobiliers...), afin d'éviter les à-coups sur la croissance que représentent les crises financières. La Fed américaine a déjà commencé à intégrer ce nouvel objectif dans son discours et dans sa pratique, ce qui n'est pas le cas de la plupart des autres banques centrales. Il convient d'inclure également la stabilisation des taux de change (qui sont un prix d'actif essentiel) dans les objectifs des banques centrales. De tels changements impliquent d'importantes inflexions dans les principes et dans le cadre d'analyse théorique qui ont gouverné la mondialisation au cours des deux dernières décennies, pour redonner plus de poids à l'encadrement de la finance par les Etats, dans un sens moins libéral. Ce qui impliquerait notamment des banques centrales moins indépendantes, qui devraient décider avec les gouvernements et les parlements des objectifs de la politique monétaire, tout en restant libres des instruments qu'elles utilisent. »


Mis en ligne le 20/03/2008 par Pierre Ratcliffe. Contact: (pratclif@free.fr) sites web http://paysdefayence.blogspot.com et http://pierreratcliffe.blogspot.com