France Allemagne, Merkozy, Merkoland

Les évènements se déroulent; le monde évolue comme toujours; les experts analysent et ajustent leurs discours aux circonstances. Voici quelques réflexions qui éclairent le débat "austérité-croissance", la position dominante de l'Allemagne en Europe, le prétendu alignement de la France...

L'Allemagne ex RFA (République Fédérale Allemande) a été confrontée pendant les années 1990 et 2000 aux conséquences économiques et sociales de la réunification avec l'Allemagne de l'est (RDA République Démocratique Allemande). Cette réunification marque le retour de l'Allemagne dans sa souveraineté d'avant la 2è guerre mondiale. Il a fallu que la RFA absorbe les 18 millions d'habitants de la RDA et une économie qui avait divergé et pris 40 ans de retard de développement par rapport à la RFA (lien).

La réunification fut effective par traité entre les deux Allemagnes le 31 août 1990, et avec les alliés vainqueurs de l'Allemagne nazie lors de la 2è guerre mondiale (États-Unis, Angleterre, Union Soviétique et France) le 12 septembre 1990 - soit près d'un an après la chute du mur de Berlin séparant les deux Allemagnes (9 novembre 1989), et plus d'un an après le début des mouvements populaires; les allemands de l'est en avaient assez de leur régime, la RDA, et voulaient rejoindre l'Allemagne de l'ouest la RFA. Voir ces liens sur la chute du mur de Berlin.

Politiquement, la réunification de l'Allemagne fut conduite par le chancelier de RFA Helmut Kohl, chef du parti CDU (parti de la droite allemande fondé en 1945). Helmut Kohl était chancelier depuis les élections d'octobre 1982 (Christliche democratische union).

Helmut Kohl et la CDU bénéficièrent de l'aura de la réunification lors des élections en RFA et RDA. Il fut réélu sans difficulté chancelier en 1991; il fit face aux conséquences difficiles de la réunification et fut réélu en 1994. Il conduisit l'adaptation aux conséquences de la réunification jusqu'en 1998.

Trois principales conséquences de la réunification:

Monnaie unique entre RDA et RFA: Ce fut d'abord le traité monétaire signé à Bonn au Palais Schaumburg (Chancellerie fédérale), le 18 mai 1990 entre la RFA et la RDA; ce fut le premier acte de la réunification allemande. À partir du 1er juillet 1990, le Deutsche Mark DM de la RFA devenait la monnaie de la RDA. L'ancien Mark est-allemand (OM Ostmark) fut échangé à parité de 1 OM pour 1 DM alors que cette parité ne reflétait pas des économies aussi divergentes.

Privatisations d'entreprises en RDA: Ce furent ensuite les privatisations pour assurer la transformation des structures économiques est-allemandes à l'économie de marché de la RFA. Cela nécessita la privatisation de 14000 entreprises d'État et coopératives existantes en RDA, représentant près de 80% de l'économie. La conduite du processus des privatisations fut confiée à un organisme de droit ouest-allemand, la Treuhandanstalt, qui siégeait à Berlin Est dans l'ancien bâtiment du Reichsluftfahrtministerium (Ministère de l'Air du Reich de Göring) et employait 4000 personnes. Cette transformation entraîna des liquidations d'entreprises non rentables avec toutes les conséquences économiques et sociales.

Dette publique de la RDA: Ce fut enfin le transfert des dettes publiques de la RDA; elles furent transférées dès 1994 à un fonds spécial et réparties à part égales entre l'État fédéral et les nouveaux Länder de l'est, les recettes des privatisations servant en partie au désendettement.

Tout ceci impliqua durant les années 1990 début 2000, des salaires très inférieurs en ex-RDA à ceux d'ex-RFA (au départ salaires RDA à 40% du niveau des salaires en RFA), et des stagnations puis modération et baisses des salaires en ex-RFA.

La récession qui a frappé l’Allemagne après la réunification provoqua une remise en cause du modèle d’économie sociale de marché (le capitalisme rhénan auquel on attribue le miracle économique allemand de l'après guerre). L'insuccès des mesures prises pour enrayer la montée du chômage provoquent une forte baisse de sa popularité, y compris dans les Länder de l’Est qui lui étaient favorables lors de la réunification. C'est pourquoi, la CDU a perdu les élections en 1998 au profit du SPD Sozialdemokratische Partei Deutschlands le parti socialiste allemand dirigé alors par Gerhard Schroeder. Celui-ci devient chancelier en 1998 et le restera jusqu'en 2004.

La suite de l'adaptation de l'économie allemande aux conséquences de la réunification, menée par le chancelier Gerhard Schroeder, se focalisa sur le redressement de la compétitivité de l'économie basée sur le rétablissement des marges des entreprises, la modération des salaires, la réforme des retraites, l'ouverture aux pays de l'est ex-PECO par la délocalisation de productions intermédiaires, la consolidation des filières industrielles avec collaboration des grands groupes et du tissu des PME; tout cela en consensus avec les puissants syndicats allemands et l'opinion publique jusqu'en 2005 (lien: Comment Gerhard Schroeder a restauré la compétitivité allemande).

Les deux premiers liens de droite (videos de Xerfi canal | Alexandre Mirlicourtois) sont particulièrement intéressants. La thèse est que l'Allemagne a défendu ses intérêts de stratégie économique propres, et que les autres pays dont la France (sous entendu de Sarkozy) n'a pas su défendre les siens.

Je serai content d'avoir vos réactions.


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Mis en ligne le 22/05/2012