Crise financière, crise économique, crise sociale comment crise financière s'est étendue à l'économie réelle.

La crise financière s'est étendue à l'économie réelle par l'assèchement du crédit entre les banques. Les banques excédentaires en cash en fin de journée ont pour pratique courante de prêter aux banques en déficit de cash. Du fait de pertes importantes liées aux "subprimes", voire colossales pour certaines d'entre elles, les banques se sont trouvées en manques importants de fonds propres pour assurer l'équilibre de leurs bilans. Toutes les banques étant dans la même situation, elles ne pouvaient plus se prêter entre elles. Cela a provoqué des difficultés de trésorerie dans nombre d'entreprises qui avaient recours au découvert bancaire pour assurer leurs fins de mois - paiement des salaires et des fournisseurs. En même temps les achats par les consommateurs notamment de biens durables comme les voitures, ont été reportés. Cela a entraîné une baisse de la production de producteurs, de leurs sous traitants et fournisseurs. Ces éléments conjugués ont provoqué le chômage de centaines de milliers de salariés qui subissent l'éclatement d'une bulle financière dont les actifs et profits se sont évaporés. Aux États-Unis les ménages clients des banques ont été expulsés de leur maison provoquant la crise du marché immobilier et les pertes colossales des banques au point que l'État a dû intervenir pour les sauver par des nationalisations. Même si ces nationalisations sont dites temporaires, elles constituent un changement majeur dans le pays le plus "libéral" du monde.

Les banquiers ont ainsi laissé se développer une bulle financière depuis les années 1990 de plus en plus déconnectée de l'économie réelle, pour servir en priorité les actionnaires en capital; la bulle financière a permis l'enrichissement des catégories les plus riches - actionnaires et patrons des grandes entreprises, des banques et leurs traders - sans se soucier des conséquences que ces fortunes indécentes ne manqueraient pas de provoquer dans l’économie réelle. Voir l'étude de Camille Landais. La richesse y est due à l'énorme accumulation de capital permise par cette évolution, capital en valeurs immobilières et mobilières.

Trop élevé en faveur des salariés durant la décennie 1975-1985 car défavorisant les profits et l'investissement, le partage de la valeur ajouté a évolué au bénéfice des actionnaires et au détriment des salariés depuis la fin des années 1980. Voir ce graphique et les deux études sur la valeur ajoutée listées en liens à gauche. Coincidence? depuis 2003, la tendance est à la baisse de la valeur ajoutée en faveur des salariés et à la hausse de la part des entreprises, alors que l'investissement a peu augmenté.

La crise a commencé par toucher les secteurs du bâtiment et de l'automobile, producteurs, équipementiers et tous leurs fournisseurs. La croissance économique déjà faible avant la crise est devenue nulle et négative; le gouvernement a mis du temps à reconnaître que la France était entrée en crise puis en récession. Mais les mesures prises dès la fin 2008 ont été les bonnes, cad. les seules que pouvait prendre un gouvernement responsable de l'ordre public. Aider les secteurs d'activité les plus touchés, aider les ménages les plus modestes par des dégrèvements d'impôts, inciter les français à réduire leur propension élevée à épargner - les français sont ceux dont le taux d'épargne est le plus élevé - (voir cette étude) et lancer des programmes d'investissements publics d'anticipation de sortie de crise. En même temps, tenter de remettre en place une régulation de la finance internationale - par l'action concertée au sein du G20 - et venir en aide au secteur bancaire français sinistré par la crise provoquée par l'éclatement de la bulle crée par le système bancaire international. C'est dans cette optique que s'inscrivent toutes les mesures prises par le gouvernement, dont le prêt de 7.8 milliards à l'industrie automobile sous forme de prêts, les 360 milliards aux banques et les 26 milliards de dépenses de l'État anticipant la sortie de crise. Il s'agit en fait d'un vaste système d'aide à l'économie. Voir ici toutes les mesures.

Le gouvernement ne peut pas faire autrement sans risquer des troubles sociaux qui pourraient être graves. Que ces mesures promettent le succès, la sortie de crise, la reprise du "business as usual" c'est à dire "on continue comme avant" est autre chose. L'avenir le dira. Mais je note que dans cette situation de crise que d'aucuns qualifient de "systémique", les débats sur la situation de la France, les causes de cette situation et les remèdes à utiliser, ainsi que l'opposition systématique des syndicats, des partis politiques de l'opposition et des médias s'est singulièrement atténuée.

Le 13 août suite à publication par l'INSEE des statistiques du 2è trimestre 2009, les média ont annoncé une sortie de crise!!! +0.3% du PIB!!! effet de la prime à la casse pour relancer le secteur automobile. Voir ici et surtout les commentaires.

On peut penser que cette crise reflète une évolution de notre société et qu'elle annonce la remise en cause du modèle de croissance exponentiel "indéfiniment" de la production/consommation. Lester Brown à l'instar de Nicolas Hulot et de tous les chantres de la décroissance nous en donne les raisons en notant le nombre croissant de pays où le stress écologique, économique et social déstabilise les gouvernements. Voir ici et ici.

Un élément important de la crise se trouve dans la mondialisation liée à la libéralisation des échanges: liberté de circulation des biens et des services, liberté de délocaliser les capitaux à la recherche des profits maximum en minimisant par l'externalisation des coûts de production, de la main d'oeuvre et des matières premières et en vendant les produits fabriqués dans les pays les plus riches. En favorisant l'émergence d'une bulle de la finance mondiale, les institutions financières - ont incité les opérateurs à sousestimer les risques inhérents à l'économie réelle, voire à ne plus en tenir compte du tout. Les institutions financières, les opérateurs financiers non régulés et tous les produits financiers ont ainsi échappé à tout contrôle. Le processus est clairement expliqué ici par Michel Aglietta économiste.


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Mis à jour le 12/10/2016 pratclif.com