ArcelorMittal, Florange: hauts fourneaux et aciérie de Florange
une fermeture inéluctable

Florange est un complexe sidérurgique spécialisé dans la production de bobines de tôles de haute qualité - produits intermédiaires utilisés par l'industrie automobile (tôles galvanisées), tôles fines étamées(pour les conditionnements). Il se compose d'un site ancien de hauts-fourneaux et d'une aciérie impantés sur la rive ouest de la Fensch et à 1km au Nord d'une usine de laminage avec trains de laminage à chaud, de laminage à froid, de galvanisation et d'étamage. Un des principaux produits (en tonnage) sortant de cette usine, est un produit intermédiaire pour l'industrie automobile à savoir des bobines de tôles galvanisées. Voir l'ensemble des deux sites [lien] et le site de l'usine de laminage [lien] (crédit google earth).

Le schéma de principe suivant montre la disposition d'une telle usine. On y trouve successivement des hauts-fourneaux produisant de la fonte à partir de minerais de fer et de coke - lequel est produit à partir de charbons à coke dans une cokerie, puis une aciérie avec un convertisseur à oxygène qui transforme la fonte riche en carbone en acier à teneur en carbone contrôlée, puis une poche où l'acier est affiné davantage pour obtenir la nuance (composition chimique) demandée, puis une coulée continue qui produit des brames et enfin une usine de laminage - à chaud, à froid et de galvanisation - qui transforme les brames en bobines de tôles produit fini pour les clients.

En ce qui concerne la qualité des bobines de tôles, Florange produit des bobines en acier de très haute qualité, eu égard à la composition chimique, aux caractéristiques mécaniques, à l'absence d'inclusions de corps étrangers, ce qui est un élément essentiel pour le producteur automobile. Au point que les ingénieurs aciéristes travaillent chez les constructeurs pour répondre à des demandes de qualités de tôles répondant à des besoins spécifiques, ce qui constitue pour le producteur automobile un avantage de compétitivité un certain temps. L'aciérie de Florange sait produire des aciers répondant à de tels besoins spécifiques des bobines. Mercédès et BMW comptent parmi ses principaux clients.

Dans la situation de crise actuelle en Europe et dans le monde, la demande de produits sidérurgiques est en baisse sensible - produits finals et tous les produits sidérurgiques intermédiaires. Arcelor est en surcapacité dans ses usines de Dunkerque et de Fos sur Mer qui produisent aussi des tôles d'acier pour l'industrie automobile. C'est la raison pour laquelle ArcelorMittal a arrêté, il y a déjà 14 mois, la partie amont de Florange jusqu'à la production des brames - cad. les hauts-fourneaux et l'aciérie. Par conséquent, actuellement seuls les laminoirs fonctionnent à partir de brames importées d'autres complexes sidérurgiques d'ArcelorMittal, Dunkerque (principalement aujourd'hui), Fos sur Mer et d'autres usines du groupe. Dans la situation de faiblesse de la demande de tôles pour automobiles en Europe, ArcelorMittal optimise ses facteurs de production et les produits intermédiaires nécessaires à sa production. C'est une stratégie industrielle qui s'impose, comme à toute entreprise, pour assurer sa rentabilité et sa survie. Le groupe ne laissera pas tomber un investissement comme celui de son laminoir à chaud de Florange qui fut un investissement majeur d'Usinor-Sacilor (la société Sollac).

Tout ceci résulte de la mondialisation et de la division internationale du travail. ArcelorMittal a acquis depuis la fin des années 1980, un grand nombre de sidérurgies en difficulté dont la sidérurgie française ex Usinor et Sacilor, devenue ensuite Arcelor regroupant les sidérurgies Luxembourgeoise, française et espagnole (lien). ArcelorMittal est le premier producteur d'acier du monde. Le groupe possède dans le monde entier des mines de fer, des mines de charbon à coke, des sites sidérurgiques intégrés - cokeries, haut-fourneaux et aciéries, laminoirs... voir leur site web.

Le projet ULCOS

Florange a été choisi comme site industriel possible pour le projet européen ULCOS, pour y créer le premier démonstrateur de recyclage des gaz de haut fourneau et captage de CO2 (lien), dans l'optique de la réduction des gaz à effet de serre liés au changement climatique. La région Lorraine cherche à promouvoir ce projet (lien) ce qui s'explique par le souhait de préserver des emplois et de s'adapter à la mort lente de la sidérurgie lorraine par des alternatives. Mais ce projet n'intéresse par ArcelorMittal comme industriel.

Actualités en septembre 2012

Voir actualités Florange septembre 2012 ici.

ArcelorMittal a annoncé son intention de fermer définitivement le site Sollac de Florange, hauts-fourneaux et aciérie - et de continuer l'exploitation de l'usine de laminage à chaud. Vu la situation sociale que cette annonce suscite après des mois de fermeture et d'incertitude, le gouvernement a annoncé qu'il souhaitait trouver un repreneur. Mais ceci relève selon moi d'un effet d'annonce pour le moment. Un repreneur produira toujours des brames par la coulée continue et il ne pourra les vendre qu'aux prix de marché de ces produits intermédiaires, donc à l'usine de laminage dite partie froide. Dans ces conditions la seule solution possible serait que l'investisseur reprenne la totalité du complexe à la place d'ArcelorMittal. Ceci implique qu'ArcilorMittal cède aussi l'usine de laminage [lien]. , par une négociation suivie d'une transaction ou par la contrainte de l'État et de la région vu les subventions à Mittal dans les années 1990 (*), une nationalisation donc. Ce n'est que sur le produit fini - tôles automobile galvanisées - qu'un repreneur éventuel pourrait entrer en concurrence sur le marché sans avoir Mittal comme seul client, ce qui reviendrait au même que la situation actuelle.

(*) À noter que déjà en 2000, Guy Dollé le PDG d'Arcelor envisageait la fermeture des hauts-fourneaux et de l'aciérie de Florange pour 2010. La sidérurgie lorraine (fonte et acier), basée sur le minerai de fer lorrain pauvre en fer et phosphoreux est en voie de disparition depuis 3 décennies (voir "la sidérurgie française histoire d'une faillite"); cela a commencé par la minette de Lorraine, cela s'est poursuivi par le charbon, par la restruction de sites sidérurgiques, Florange étant le dernier.

Aux dernières nouvelles, Mittal aurait accepté de céder les hauts-fourneaux et l'aciérie à l'État; belle affaire pour Mittal; ils se défaussent du site sur l'État; plus de contrainte de démantèlement et de dépollution! Ce sera pour l'État et la région cad. pour les contribuables.

Voir le diaporama du site Sollac de Florange et ces images sur Sollac.

Quant au projet ULCOS, de captage et de séquestration du CO2 que le gouvernement et la région Lorraine ont en tête, un projet écologique; mais quel investisseur privé investirait là dedans? Ce serait forcément un projet financé sur fonds publics européens ou français pour servir de démonstration. Et il faut que les haut-fourneaux et l'aciérie marchent. Mais avec quelle certitude de succès? et le risque d'être un nouveau minitel ou plan Bull! Je ne sais si un tel projet est la solution pour l'évolution industrielle de la Lorraine.


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Mis à jour le 28/09/2012