Le pétrole pas cher c'est fini;
quelles données géologiques et statistiques? 2/3

Le pétrole est une ressource finie à l’échelle de la planète; sa production ne pourra donc pas augmenter indéfiniment et répondre éternellement à des besoins énergétiques qui croissent exponentiellement. La production ne pourra pas non plus durer éternellement car les gisements de pétrole ont des caractéristiques de génèse géologique très particulières et sont relativement rares et inégalement répartis sur la planète. Si compte tenu des réssources de tous les gisements connus - réserves prouvées, probables et possibles - la fin de la production du pétrole n’est pas imminente, elle est inéluctable à plus ou moins long terme. Les réserves prouvées varient selon les estimateurs, mais sont du même ordre de grandeur. En 2008 selon BP qui compile chaque année des statistiques de pétrole et de gaz, les réserves prouvées de pétrole étaient de 1258 milliards de barils (hors sables asphaltiques du Canada), tandis que la production était de 81.8 millions de barils. Ces réserves assurent donc 43 ans de production au rythme de 2008, chiffre qui ne peut qu'augmenter.

Télécharger le dossier statistique BP édition Juin 2009.
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L'historique des réserves et de la production montre que les réserves ont toujours été de #40 ans de production. C'est que les pétroliers se sont toujours efforcés de trouver de nouvelles réserves qui compensent les volumes extraits; soit en augmentant le degré de certitude de volumes qualifiées de réserves probables ou possibles, voire de réssources non quantifiées. Ou en découvrant de nouveaux réservoirs et champs pétroliers, ou encore en augmentant les taux de récupération envisagés.

En revanche, ce qui est beaucoup plus probable, c'est que le pétrole bon marché, facile à extraire et de qualité - faible viscosité - telle que le raffinage soit également facile et peu coûteux, va se raréfier à court ou moyen termes. La croissance de la demande mondiale de pétrole - 1987, 85 millions de barils.jour, prévision AIE pour 2030 115 millions de barils/jour, soit une hausse de 30 millions de barils/jour - ne pourra pas être satisfaite par la structure actuelle de l'offre de pétrole bon marché. Cette hausse ne pourra être compensée que par le recours à des ressources plus difficiles d'accès et d'exploitation et donc plus coûteuses: réservoirs offshore profonds et loin des centres d'infrastructures, arctique, extraction assistée, sables et schistes bitumineux du Canada et du Vénézuela. La conjonction de la demande, d'une offre tendue et de coûts plus élevés, entraînera forcément une raréfaction et un renchérissement du pétrole. En 2008 le prix du pétrole a atteint les 140$/baril à cause d'une forte demande, notamment de la Chine, et de l'incapacité de l'offre à s'ajuster à cette demande. Depuis, la crise financière et la crise économique qui en est résulté, ont fait chuter la demande en dessous de l'offre de sorte que le prix du pétrole est redescendu à moins de 60$/baril. Mais il ne s'agit sans doute que d'un répit et la plupart des experts tablent sur un prix moyen de 80$/baril.

Il s'agit donc d’anticiper la raréfaction et le renchérissement du pétrole en préparant la transition énergétique, en particulier dans les transports. 40% de l'énergie est dépensée dans les transports terrestres maritimes et aériens; et 90% des transports utilisent le pétrole.

En même temps le pétrole va se trouver de plus en plus concentré dans des pays instables politiquement cad. le Moyen Orient, la région la plus productrice du monde (25% de la production 2008), Arabie Saoudite, Iran, Koweit, Irak, Émirats Arabes Unis (EAU). Voir ici. En effet, les réservoirs de pétrole, les champs pétroliers et les bassins pétroliers, tout comme les gisements métalliques, s'épuisent et ce d'autant plus vite qu'on les exploite intensément par de nombreux puits et compagnies pétrolières, ce que permet le mode de dépôt du pétrole. Ceci n'est pas du tout le cas des gisement métalliques (sauf or et diamants, petits orpailleurs dans les placers). C'est ainsi que l'on a vu la production pétrolière cesser ou drastiquement décliner aux États-Unis, dans certains comtés du Texas (McCamey compté d'Upton qui s'est reconverti à l'éolien), en Azerbaidjan (Baku). Voir ici des photos de sites abandonnés du Texas. Et ici l'histoire de Baku.

Les booms pétroliers dans certaines régions pétrolifères, suite à la découverte d'un réservoir important par un forage "wildcat" ou forage d'exporation réussi, suivi ensuite de la découverte d'autres réservoirs cad. d'un champ, sont bien documentés. Une fois un wildcat réussi, les investisseurs arrivent nombreux, obtiennent des concessions, forent des puits et se mettent à exploiter partout à la fois. La production se met rapidement à croître; mais avec le grand nombre d'exploitants, le reservoir et le champ se mettent à décliner et la production s'effondre aussi rapidement qu'elle avait augmenté. Les exemples quantifiés sont légion et citées par Matt Simmons, expert pétrolier américain (voir ci-contre). Ces booms suivis de déclins ont donné lieu à la théorie du "peak oil" formulée par le géologue King Hubbert. Il est intuitif que le processus observé pour une puits de pétrole, doit exister au niveau d'un champ, d'un bassin, d'un pays, voire de la planète entière. Voir ici.

La raison du déclin est le mode de dépôt, lié à la génèse du réservoir.

D'abord, les gisements de pétrole se sont formés au cours de centaines de millions d'années par dépôts de matières organiques en conditions marines. La sédimentation a ensuite recouvert ces dépôts et la transformation des matières organiques en hydrocarbures s'est produite des centaines de millions d'années après.

Trois conditions principales doivent être réalisées pour qu'un réservoir de pétrole se soit formé au cours du temps géologique:

  • il doit exister une source riche en matériaux hydrocarbonés ensevelis assez prdeondément pour que la chaleur souterraine transforme ces matériaux en pétrole;
  • il doit exister une roche réservoir poreuse et permeable dans laquelle le pétrole puisse s'accumuler;
  • et une roche chapeau ou bouchon qui empêche le pétrole de s'échapper vers la surface.

Dans ces réservoirs, les fluides s'organisent en 3 couches superposées; d'abord l'eau, puis le pétrole plus léger et au dessus le gaz. Voir ce schéma.. Les dimensions des réservoirs varient très largement. Parce que les hydrocarbures sont plus légers que l'eau ou les roches, ils migrent souvent vers les roches adjacentes jusqu'à remonter à la surface ou être piègés dans les roches poreuses; le pétrole et le gaz sont alors disséminés dans les vides de la poristé des roches pièges. Le processus de migration peut être influencé par les circulations d'eaux souterraines, ce qui provoque des migrations sur des centaines de km horizontalement ou vers par gravité vers le bas avant d'être piégés par un réservoir. Quand les hydrocarbures sont concentrés dans un piège, un champ de pétrole se forme d'où l'on peut extraire pétrole et gaz par forage et pompage. C'est la porosité de la roche, la perméabilité et pression du gaz qui permet l'extraction facile par pompage ou naturelle. Mais c'est la modification de la porosité, de la perméabilité et de la pression, dues à l'exploitation qui conduit au déclin. Pour compenser on a recours à l'extraction assistée ou secondaire.

Voir cet article sur les taux de déclin. Il est expliqué que les techniques d'extraction assistée (enhanced extraction )ne font qu'accélérer le déclin d'un réservoir en permettant d'extraire davantage. La grande inquiétude actuelle c'est que l'immense champ de Ghawar en Arabie Saoudite serait en déclin de l'odre de 13% par an. Les Saoudiens sont en train d'augmenter le nombre de puits pour maintenir la production. Si Ghawar s'effondre comme certains commencent à le craindre, ce sera vraiment la fin du pétrole bon marché car Ghawar c'est 5 millions de barils par jour.

La nature des réservoirs et des champs pétrolifères fait qu'on peut y installer de nombreux puits au dessus et ainsi extraire à un rythme très élevé et dans un temps d'exploitation très court; ce temps influe sur la capacité du réservoir à donner les volumes envisagés au départ car le mode d'extraction peut influer sur la porosité et la perméabilité des roches mères. Le volume de la production et la durée de vie du réservoir est fonction de l'investissement mis en oeuvre cad. le nombre de puits. Dans le cas des mines métalliques, cela se passe différemment. La relation entre les réserves, la capacité de production annuelle et la durée de vie de la mine, le montant des investissements nécessaires ce niveau de production, et la combinaison de ces facteurs pour pour atteindre la valeur ajoutée actualisée maximum, relèvent d'un seul opérateur minier. On ne peut pas se mettre à plusieurs depuis la surface, pour extraire la ressource.

Voir géologie du pétrole.


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Mis en ligne le 07/03/2012